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 La YEVSEKTSIA

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MessageSujet: La YEVSEKTSIA   La YEVSEKTSIA EmptyVen 23 Juin 2006, 11:38 am

Source : http://kountras.magic.fr/index.php?publid=2&articleno=2

La "Yevsektsia", la Section juive du Parti Communiste

(Adar II 5763 / Mars 2003) - 'Habad en Russie


Citation :
Contrairement à toutes les autres familles 'hassidiques, Loubavitch a pris une direction d'ouverture et de soutien au peuple juif : non plus l'unique repli autour d'une communauté ou d'un dirigeant - bien que ce dernier aspect caractérise Loubavitch - mais aussi un grand souci du sort des autres Juifs. Cette disposition prend une importance capitale au moment où l'étau se referme sur les Juifs en URSS et que la vie juive authentique est traquée dans toute l'URSS. Les divers représentants de 'Habad apportent dans chaque endroit une vie juive telle qu'elle doit être.

Tout cela est en fait l'œuvre de deux dirigeants de cette 'hassidouth : le Maharachab et le Maharayats, au début du 20ème siècle, le premier ayant créé la Yechivath Tomkhé Temimim, renforçant le système pédagogique de 'Habad et assurant la formation de nombreux cadres rabbiniques et para-rabbiniques (Cho'hatim, Mohalim, etc.), alors que le Maharayats, son fils, a envoyé ces cadres dans toute l'Union Soviétique, y compris la Géorgie et Boukhara (Ouzbékistan).

Notre peuple a connu, au 20ème siècle, deux catastrophes : l'une est celle connue de tous, durant la Choa sous les Nazis, qui s'en sont pris au corps du peuple juif. La seconde est moins connue, voire oubliée : c'est celle que notre peuple a subie en Russie ! Là, c'est l'âme juive qui a été traquée, durant vingt, trente ou soixante-dix ans... Malheureusement, ce sont au départ nos propres frères qui ont aussi fait peser le joug sur nos épaules, ainsi que nous allons le voir ici.

La Yechiva, cependant, a longtemps continué à être le phare de notre peuple dans cette partie du monde où en fait la forme moderne de cette institution est née, au début du 19ème s. avec rabbi 'Hayim de Volozhyne, et nous verrons avec quelle abnégation des centaines de jeunes et des dizaines de cadres ont perpétué la tradition, envers et contre tout. 'Habad était alors à la pointe de cette lutte.

'Habad, avec le Maharachab et surtout le Maharayats, était en fait l'élément actif du judaïsme pratiquant durant les premières décennies de la tyrannie soviétique. Nous verrons à quel point le Maharayats a pris sur lui la défense et l'encouragement du Judaïsme russe.

Tout cela, pour arriver à la période de la Choa, durant laquelle une grande partie de la communauté 'Habad s'est retrouvée en Ouzbékistan, d'où elle repartira à la fin de la Guerre en un sauvetage remarquable et miraculeux. De là se formera le noyau de la communauté 'Habad de France - notre prochain dossier.

La " Yevsektsia "

La section juive du Parti communiste

Afin de mieux comprendre les difficultés qu'ont rencontrées les communautés juives en Russie, un chapitre doit être consacré à la " Yevsektsia " de mémoire maudite ! Il s'agit de la Yevraiskiya sektsia, la section juive du Parti communiste. Cette plaie s'ajoutait en fait à d'autres éléments visant à éliminer la pratique juive et à inciter la jeunesse à quitter le giron du judaïsme traditionnel (c'était l'œuvre de nombreux groupes intellectuels en Russie d'alors, avec les Bundistes, les Sionistes laïques et d'autres, sans parler des socialistes et des communistes), mais les Juifs qui ont fait le pas d'adhérer à la Yevsektsia ont dépassé en cruauté et en violence tout ce qui avait pu être fait dans le passé, depuis que notre peuple existe !

Les espoirs déçus du 20ème siècle pour la communauté juive en Russie

Le Judaïsme russe a connu, sous les tsars, un siècle d'une dureté extrême. Sans parler du manque de liberté qui était l'un des éléments majeurs sous le règne de ces souverains - quand, en Europe occidentale, la liberté, l'égalité et la fraternité assuraient ces droits élémentaires aux Juifs et aux autres minorités, certains décrets terrifiants ont rendu très difficile la vie des membres de notre " nation " : c'est le cas en particulier du décret des Cantonistes (cf. Kountrass no 28), par lequel des jeunes Juifs étaient pris par l'armée dans leurs plus jeunes années, et, après une période d'" éducation ", ils étaient enrôlés pour la période de 25 ans, ou encore de l'interdit de résidence dans certaines agglomérations.

En février 1917, le régime tsariste a été renversé, et un vent de liberté et d'espoir a soufflé sur la Russie. Le nouveau régime se préparant à établir une vraie démocratie parlementaire, les diverses forces politiques du pays se sont constituées afin de se présenter devant le peuple et d'obtenir ses voix. Cela a été le cas également de la minorité juive : une cinquantaine d'organismes religieux se sont réunis pour constituer une liste électorale propre, avec d'importants délégués, voire des rabbanim, à sa tête. En tamouz de cette année, 120 représentants ont lancé un parti, " A'hdouth ", censé représenter le judaïsme pratiquant de la Russie. Les dirigeants orthodoxes ont signé ensemble un appel à la population, leur demandant de prendre part à ces élections. On y trouve les signatures de rav 'Hayim Soloveitchik, du 'Hafets 'Hayim, de rav Chalom Dov Ber Schneersohn, de rav 'Hayim 'Ozer Grodzinski, du Rogotchover, et d'autres, en fait, des grandes autorités de leur temps.

Tous ces espoirs ont été réduits à néant par la Révolution d'Octobre, avec l'arrivée des bolcheviques au pouvoir.

Beaucoup d'ouvrages ont été consacrés à la période stupéfiante durant laquelle Hitler a dirigé son pays et a mené la guerre en Europe, ainsi qu'à son plan d'anéantissement du peuple juif. La souffrance des Juifs en Russie soviétique a été beaucoup moins décrite, alors que leurs supplices n'ont pas été moindres que ceux des Juifs sous le régime nazi. Hitler a réellement œuvré durant quelque cinq années, alors que les Soviétiques ont poursuivi les Juifs pendant près de soixante-dix ans !

Si Hitler en voulait aux corps (bien que nous ayons en son temps, dans Kountrass no 17, bien insisté sur le fait qu'il savait parfaitement de quoi l'âme juive était faite et qu'il désirait également combattre la spiritualité), le communisme s'en est pris à l'esprit, cherchant à casser toute manifestation de la vie juive, et à faire disparaître de la terre la Tora d'Israël.

Le pire est que dans ce dernier cas, ce sont des Juifs eux-mêmes qui ont lutté contre leur propre peuple, afin de briser sa nature et de broyer sa résistance, essentiellement jusqu'en 1930.

Les Yevsektzie's 1 : " Tes destructeurs et les auteurs de ta ruine sortent de tes propres rangs " (Yecha'yahou/Isaïe 49,17)

Car, nous l'avons dit plus haut, telle était la réalité historique : c'est de leurs propres frères que les Juifs ont le plus souffert alors. Officiellement, il était permis de maintenir une certaine forme de pratique religieuse et d'étude juive en URSS, mais les membres juifs du parti communiste ont déployé tous leurs efforts pour détruire tout reste de vie juive dans leur pays.

Le Maharayats, désirant expliquer aux Juifs vivant hors de Russie quelle était la conduite des gens de la section juive, la Yevsektsia, écrit :

Dans le langage des Yevsektzie's : " Prendre tout ce qu'il y a à la maison au point de laisser les gens nus comme le jour de leur naissance, les retenir en prison durant dix mois, puis les envoyer en exil pour trois ans et plus ".

Les personnes vivant dans les pays libres ne peuvent pas comprendre ce que signifie être jeté entre ces murailles [Ndlr : les centres de la police secrète, puis le KGB], dans lesquels les prisonniers peuvent être condamnés à mort sans le moindre témoin ; il est aussi difficile de décrire le sort de ceux qui sont exilés, quand les responsables et les gardiens sont des condamnés à la prison à perpétuité, pour assassinat ou vols [...].

Nos frères, citoyens russes, peuvent être comparés à nos frères victimes des poursuites de l'Inquisition en Espagne, bien que les malheurs et les calamités dont ils souffrent de nos jours soient pires. Là-bas, nos frères souffraient d'ennemis étrangers, maintenant ils endurent des persécutions de la main de nos propres frères. "

La presse de la Yevsektsia

L'un des organes de presse officiel de la Yevsektsia qui paraît alors sous le nom de " Emess " 2 se vante, l'une de ces années où ses sbires oeuvrent en Russie, de son " succès " quant à l'annulation du respect de la fête de Pessa'h, mais doit reconnaître sa déception devant le fait que l'" ennemi " a tout de même réussi à se réunir pour la fête. C'est le cas à Kiev, Kharkov, et d'autres villes : pendant que les jeunes prolétaires célébraient le soir du Séder dans la rue (rassemblement organisé à leur habitude pour empêcher la participation au Séder familial), leurs parents et leurs proches fêtaient le Séder chez eux. Qui sait, ajoute ce journal, s'il n'y a pas eu des cas de jeunes, qui rentraient chez eux, prenaient part au Séder et commettaient la faute de manger de la matsa le soir de Pessa'h !

A Moscou, la méthode suivie était différente : on n'organisait pas de manifestations ce soir-là, mais, au contraire, on invitait à des soirées de Pessa'h les prolétaires à qui on lisait une " haggada " contre la foi tandis qu'un orchestre jouait de la musique... Les synagogues de Moscou étaient pleines de monde. La communauté juive de la capitale a distribué des matsoth et de l'argent à cette occasion, sans que les autorités s'y opposent. Certains Juifs ont même refusé de prendre les matsoth venant de l'étranger, se lamente encore notre journal, le Emess, et dans certaines villes les coopératives et les organismes d'ouvriers ont ouvert des fours pour cuire des matsoth, et, comble de l'horreur, ce sont des membres du parti des jeunes communistes qui les ont cuites 4...

Un an plus tard, en 1930, ce n'est pas mieux 5 : " La ligue des renégats en Russie a déjà lancé sa campagne contre le prochain Pessa'h. Les instructions en provenance du siège central concernent toutes les délégations : il faut se battre contre Pessa'h, organiser ce soir-là des défilés avec lampes dans les rues et des manifestations, et continuer le lendemain. Il faut veiller à faire fermer toutes les synagogues restantes. "

Emess consacre un long article à la manière dont il faut s'y prendre pour lutter contre la fête, mais, précise-t-il, " inutile de lutter contre la consommation de matsoth : on ne pourra simplement pas en trouver en Russie cette année. "

Yom Kippour

L'une de ces années-là, Yom Kippour est tombé un jour férié en Russie, et le public en était fort heureux, puisque le respect de ce saint jour pouvait être sauvegardé. Les Yevsektie's ont saisi l'affaire à temps, et se sont adressés aux autorités pour supprimer ce jour de congé. Ils ont évidemment obtenu gain de cause. Cela a provoqué un grand trouble dans le public, mais il n'y avait rien à faire. Au contraire, toute opposition mettait les gens en danger, et il a été décidé qu'il fallait aller travailler. Toutefois, à la fin de la journée, un très imposant public s'est rendu à la synagogue de Moscou, pour participer à la prière de Ne'ila, au point que beaucoup ont dû rester à l'extérieur. Cette partie des fidèles a demandé au rav, le rav Klémens, de prendre la parole, mais il était fort gêné, sachant bien que des indicateurs au service de la Yevsektsia étaient présents dans la salle. Il a annoncé qu'il ne dirait pas de paroles de Tora, mais emprunterait une allégorie. Un Juif a adopté une fois un poussin, l'invitant à vivre chez lui. Plus tard, le poussin devenu coq disparaît sans laisser de trace. Il se met de suite à sa recherche, et trouve une personne qui lui suggère de vérifier s'il n'a pas été pris pour servir de kapparoth avant Yom Kippour. Il se dirige donc vers le marché où l'on vend de la volaille à cet usage, et reconnaît effectivement son coq parmi ceux proposés à la vente. Il prie le vendeur de le lui céder, mais l'autre lui répond : " Comment peux-tu me prouver qu'il t'a été volé ? " Le propriétaire lui propose une épreuve : que l'on libère le coq, et que l'on voie dans quelle direction il se rendra... Là, le rav s'est mis à pleurer : " Venez, disons ensemble la prière " Que Ta volonté soit que l'on libère nos chaînes, et reçois les supplications de ton peuple, Israël ", et tous ont compris ce que voulait dire le rav : bien que le public ait été obligé d'aller travailler en ce saint jour, dès que les chaînes ont été enlevées, que la journée s'est achevée, tout le monde se précipite à la synagogue. Ce à quoi le public adhérait en fait était donc clair 6...
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MessageSujet: La YEVSEKTSIA (suite)   La YEVSEKTSIA EmptyVen 23 Juin 2006, 11:40 am

Citation :
La mila

Elle était bien entendu totalement interdite. L'histoire - pour une fois positive 8 - est celle d'un communiste fort embarrassé : il voulait faire circoncire son fils, mais connaissait les dangers de la chose. Il demanda en secret à un Mohel de bien vouloir circoncire son fils, mais durant une période où il serait absent de la ville. Quelques semaines plus tard, il revint chez lui, accompagné de deux camarades de la Yevsektsia, et à son grand dam, il arriva juste au moment où... le Mohel effectuait la circoncision ! L'enfant avait été malade, et la circoncision avait été retardée. Le père se mit à crier contre le Mohel : " Renégat, qu'as-tu fait, tu as profité de mon absence pour effectuer un tel attentat contre le régime ! " Le Mohel resta toutefois assez tranquille, malgré la menace, parce qu'il avait déjà effectué la circoncision des fils des deux autres Yevsektsie's qui accompagnaient l'heureux père 8... Mais ce n'est qu'une exception.

Les miqwaoth

Le Maharayats a proposé d'organiser de l'aide aux diverses communautés de Russie, et a reçu d'innombrables demandes en ce sens, avec des témoignages plus poignants les uns que les autres sur les difficultés que faisaient le parti communiste et les Juifs qui y étaient attachés dans ce domaine ô combien important de la vie juive. Citons juste les plaintes du rav Chalom Hochman, de Zlabin, en Russie blanche.

...Durant les années de la guerre, et puis pendant les périodes de pogroms (la guerre de 14-18, puis les périodes de troubles ayant suivi, en particulier après la Révolution d'Octobre), nous avons tout fait avec abnégation et il n'y a pas eu de semaine durant laquelle nous n'avons pas chauffé l'eau du miqwé. J'ai dépensé beaucoup d'argent pour cela. J'ai eu cependant de nombreux ennuis avec les autorités de ce fait.

Toutefois, cet été, lorsque j'ai voulu faire des travaux, un nouveau directeur du kolkhoz (qui était le propriétaire de l'immeuble du bain public) a été nommé, un vrai antisémite. Il a voulu dénoncer le bail que nous avions avec eux sur les bains... Il s'est vanté de reprendre les locaux pour son kolkhoz et de fermer les bassins. Devant cette menace, j'ai dû parcourir pendant cinq mois la ville pour trouver l'argent permettant d'effectuer les travaux. Mais lui, le mécréant, s'en moquait, et m'a empêché de faire ces réparations, me menaçant de diverses façons qui ne peuvent être exprimées ici. Puis il m'a fait un procès, qui m'a coûté très cher, afin de faire annuler notre contrat, mais il l'a perdu...

Là, et dans d'innombrables autres endroits, les autorités tentent d'entraver ce genre d'établissements contre-révolutionnaires...

L'étude de la Tora

Afin de provoquer la fermeture des 'Hadarim et des Yechivoth, qui existaient encore en grand nombre parmi les Juifs religieux, les Yevsektsie's ont emprunté un moyen original : l'organisation de procès publics ! Quand les juges émanaient de la section juive, et que les autres membres du tribunal étaient des Bundistes, on peut imaginer quelles étaient les issues de tels procès... Le premier procès a eu lieu à Vistok contre le 'héder local, et à Rostov contre les Yechivoth, et les Yevsektsie's, encouragés par les conclusions de ces " instances " - ils étaient alors encore gênés quelque peu par leur audace, mais par la suite, ils agiront avec bien plus de violence - ont élargi ces actions aux autres villes de Russie.

A Lipovitz, les Yevsektsie's ont confisqué l'immeuble du Talmud Tora, tout en ne se gênant pas pour conserver son nom ! L'éducation qui y était fournie était anti-religieuse. A 'Hanouka, ils se moquèrent des bougies de la fête et de la famille du rav. Avec le temps, ils sont devenus plus radicaux, et ont menacé de prison les parents qui n'enverraient pas leurs enfants dans cette école.

Sur la situation à Pariaslov, rav Ye'hiel Mendel Rappaport témoigne : cela n'a pas duré longtemps, et en 1924 les autorités ont fermé le 'Héder et interdit aux enseignants et aux parents de veiller à ce que leurs enfants sachent la Tora. N'ayant pas d'autre choix, mon père a engagé un précepteur et j'ai étudié à la maison.

De fait, la plupart des enfants ont dû passer aux écoles nationales, et les parents qui ne le faisaient pas étaient durement punis. Inutile d'insister sur les conséquences pour des familles orthodoxes 'hassidiques et pratiquantes, de remettre leurs chers enfants à des institutions pédagogiques dont la vocation était d'inculquer aux jeunes l'agnosticisme et l'incrédulité, et de leur retirer toute croyance en Hachem. C'est sur ce point que se sont révélés de remarquables cas de sacrifice de parents qui ont tenu contre vents et marées à inculquer à leurs enfants une éducation religieuse classique...

J'étais pratiquement le seul enfant à ne pas aller à l'école, dans toute la ville, il n'y avait que cinq cas de cette espèce : mes deux frères, deux autres et moi. Comme j'étais le plus âgé, je formais une " classe " pour moi tout seul. Le rav de la ville, alors le rav Yehochoua' Zélig Diskin - plus tard rav de Pardess 'Hana en Erets Israël - était mon enseignant.

L'étude dans les 'hadarim est en général illégale, lit-on dans un compte-rendu du bureau fondé par le Maharayats datant de 1929. Les classes concernent en moyenne 10 enfants. Les enseignants oeuvrent en prenant un risque personnel constant et dans des conditions les plus difficiles. Ils constituent la force qui s'oppose aux Yevsektsie's, et les autorités locales les considèrent comme des personnes ne travaillant pas et privées de droits. Le salaire d'un tel enseignant varie entre 40 et 60 roubles, ce qui suffit à peine pour la personne elle-même - que restera-t-il pour sa famille ? Ceux qui n'enseignent qu'à trois enfants, de la manière permise par la loi du pays, ne sont pas moins poursuivis par la Yevsektsia et les autorités locales.

Les jeunes ne font pas moins preuve d'abnégation : ils délaissent les droits auxquels ils auraient accès s'ils fréquentaient les écoles communistes.

La manière dont les choses pouvaient se passer à l'époque est racontée, non sans humour, par l'écrivain américain Daniel Persky qui a visité sa ville natale, Minsk, en 1930 :

A Minsk, j'ai eu envie de visiter les 'hadarim clandestins. De la bouche de vieilles femmes j'ai appris que dans l'un des couloirs de l'une des synagogues du bas de la ville on peut rencontrer le chamach [bedeau] de l'endroit qui enseigne la Tora dans la clandestinité à des jeunes enfants. Je me suis rendu dans cette cour, qui m'était encore connue du temps de ma jeunesse, et j'ai jeté un coup d'œil furtif par la fenêtre : autour de la table, j'ai vu six enfants. Le chamach leur apprenait une paracha dans le 'Houmach. L'étude se déroulait avec intensité et intérêt. J'étais déjà content d'avoir trouvé ce que je cherchais. J'ai ouvert la porte. La chambre était vide. Le chamach était assis à réparer un trou dans son habit. Dans la seconde pièce, son épouse était sur le lit, un bébé dans les bras, et elle soupirait. Quel sorcier a pu faire s'envoler ces enfants à tous les vents ? Je me suis adressé au chamach : " Il n'y a pas ici de 'héder ? " - Que Hachem nous en préserve ! a répondu le chamach, apeuré et tremblant - qui a encore besoin de 'héder de nos jours ? Et de toutes manières, c'est une chose interdite. La discussion se développant entre nous, il s'est repris et s'est écrié : " Mais tu es le fils de Rivqa. Je me souviens de toi quand tu étais enfant et que tu venais prier ici. Comment vas-tu, Daniel ? "

Sur un signe, tous les six enfants ont réapparu. Ils avaient déjà acquis une grande expérience dans les manœuvres de camouflage. Le chamach m'a montré que celui-ci s'était caché dans le lit d'enfant de derrière le four, l'autre, derrière le four lui-même, un troisième, sous un tas de chiffons. Ils avaient tous l'habitude. Au courant de l'étude, dès que des pas d'homme se font entendre, ils disparaissent. Sa femme dissimule les textes sous son oreiller. Elle conclut : " C'est ainsi que l'on étudie la Tora de nos jours en Russie."

La Yevsektsia a organisé pour sa part des écoles yiddish pour les jeunes Juifs. Il semble bien que le succès n'ait pas été celui attendu : les parents préféraient, à ce compte, envoyer leurs enfants dans les écoles d'Etat.

Certaines perles de l'" éducation " juive dans ces écoles nous sont parvenues : " Au début, Moché était un jeune très honnête. C'était un révolutionnaire, qui voulait libérer les Juifs de l'esclavage égyptien et il s'est conduit envers Pharaon comme doit le faire tout révolutionnaire. Toutefois plus tard il a vendu son âme aux bourgeois. Il est possible de constater cela dans les Dix Commandements : " Honore ton père et ta mère ". Pourquoi faudrait-il les respecter ? Ce sont des fanatiques, des opposants à la lumière, qui ont soutenu, durant le siècle noir, le Tsar russe. Pourquoi donc les honorer ? " (Hator 1924).
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MessageSujet: La YEVSEKTSIA (suite)   La YEVSEKTSIA EmptyVen 23 Juin 2006, 11:42 am

Citation :
Les rabbanim

Le sort des rabbanim n'était pas meilleur. Dans ces années-là, seules les personnes qui travaillaient, étant " productives " pour le peuple, avaient droit à de la nourriture. Les rabbanim... ? Nombre d'entre eux ont souffert de la famine et des vexations, ont été privés de soins médicaux, ainsi que leurs familles, ont été incarcérés ou exilés, simplement parce qu'ils étaient les dirigeants rabbiniques de leurs communautés ; leurs biens pouvaient être confisqués, leurs appartements pris et leurs familles jetées dans la rue - certains ont fini par devoir vivre dans les synagogues elles-mêmes. Souvent, en plus, ils se voyaient accablés d'impôts insurmontables. Nombre d'entre eux ont abandonné leurs postes, mais n'ont pas trouvé pour autant de manière " productive " de vivre. Tout était fait, bien entendu, pour briser le moral des cadres rabbiniques, et déstabiliser les communautés sur ce plan également.

Les synagogues

Le régime de séparation de la religion et de l'Etat a permis aux autorités de confisquer les synagogues, essentiellement lorsque l'expropriation était " justifiée " par un nouvel emploi utilitaire. Ce sont les Yevsektsie's qui ont le plus œuvré dans ce cadre également : les synagogues étaient nécessaires pour y organiser des clubs et des centres culturels...

Il ne restait possible d'organiser des lieux de prière qu'après demande auprès des autorités. Les responsables devaient s'engager personnellement face aux autorités quant aux bons soins apportés aux éventuels locaux que le peuple mettait à la disposition de ces gens...

Les Yevsektsie's, afin d'arriver à leurs fins, ont envoyé en exil et aux travaux forcés d'innombrables Juifs, fait jeter de nombreuses personnes dans les caves du KGB, causé la torture et la mise à mort de bien d'autres, ont amené la dislocation et la destruction d'innombrables foyers.

Bien entendu, le régime soviétique ne faisait qu'encourager ces Juifs et ne fera pas mieux, une fois la section juive fermée, mais l'impression reste que ce sont nos propres frères qui auront œuvré avec le plus d'acharnement contre leur propre nation.


Les grands rabbanim de l'époque et les Yevsektsie's

Pour donner une image de l'ampleur de la catastrophe, les rabbanim, avec, à leur tête, le 'Hafets 'Hayim et rav 'Hayim 'Ozer Grodzinski, publient, en 1929, un appel pressant à un jeûne public. On y lit :


La situation des Juifs en Russie est terrifiante, que Hachem nous préserve : près de trois millions d'âmes juives se trouvent dans une situation difficile et angoissante. Outre le désastre matériel dans lequel ils sont plongés, puisque la majorité de nos frères sont restés sans emploi et souffrent de la faim, nous sommes terriblement choqués d'entendre la catastrophe terrible frappant nos frères persécutés : ils sont poursuivis du fait de leur foi et de leur religion et souffrent des agissements des renégats ayant rejeté le joug, nos " Yevsektse's ", dont la volonté finale est d'extraire et de déraciner la Tora d'entre nous, de faire que le Nom divin ne soit plus prononcé, en provoquant la fermeture des 'Hadarim et des Yechivoth. Les dirigeants de ces institutions et les enseignants dans les 'Hadarim sont pris et sont exilés en terre de désolation. Les rabbanim sont également inquiétés. Les synagogues et les lieux d'étude sont fermés et transformés en clubs, on cherche des raisons pour fermer les miqwaoth, on tente de diverses manières d'empêcher nos frères d'obtenir de la nourriture cachère, et nombreux d'entre eux, dont les moyens de subsistance dépendent des bonnes grâces du pouvoir, hésitent à faire circoncire leurs enfants. Ils ne sont pas moins forcés à tout cela que les Juifs du temps de l'Inquisition. Et ceux qui travaillent chez eux sont également obligés de convaincre les autres de les suivre, d'abandonner le Chabbath, de manger du 'hamets en public, c'est un décret de persécution qui va amener l'assimilation, la disparition et la destruction 9...


Le 'Hafets 'Hayim a exprimé à leur égard un avis sans nuance (exposé dans " 'Iqvatha dimechi'ha " de rav El'hanan Wasserman ã"éä). Il considère ces Juifs comme s'inscrivant dans la lignée peu glorieuse d'Amalek de la génération et met sur pied le principe suivant : si des décrets sont pris contre le peuple juif et mettent en péril leur existence physique, comme du temps de Pourim, il n'y a pas lieu de se lever contre une telle décision. Si, en revanche, c'est contre l'âme juive qui est menacée, alors il faut faire comme du temps des Hasmonéens, se lever et lutter, même si les résultats ne sont absolument pas évidents !

Il écrit :


Les Juifs ont fait une erreur lors des premières persécutions des Yevsektsie's : ils auraient dû prendre les armes contre eux. Il est vrai que de nombreux Juifs auraient trouvé la mort, mais cette force satanique aurait été affaiblie. Mais comme personne ne s'y est mis, les Yevsektsie's se sont renforcés.


Lorsque les dirigeants des Yechivoth de Novardok, connues elles aussi pour leur résistance devant la menace soviétique et leur travail au sein de la communauté pour retirer des jeunes perdus dans les écoles russes ou juives des Yevsektsie's, se sont adressés au 'Hafets 'Hayim à propos d'une question de destination d'argent que le rabbi de Gour pouvait leur attribuer, la réponse du grand rav a surpris tout le monde : il s'agissait d'aider les jeunes élèves de Novardok qui avaient trouvé refuge en Pologne, abandonnant tout en Russie et se trouvant sans famille ni soutien. Ils étaient quelque six cents dans ce cas ! Le 'Hafets 'Hayim a refusé de prendre position : " Qui vous a dit qu'il fallait quitter la Russie ! Au contraire, il faut lutter et continuer à y propager la Tora ! 10 "

Cette position exceptionnelle, en provenance du dirigeant incontesté du judaïsme d'alors, est surprenante de dureté et remarquable dans ses incidences! Mais, comme il le dit lui-même, le peuple juif n'a pas pris position dans son sens.


Rav Wasserman explique ailleurs (Davar lador chapitre 4) :


Alors que dans les générations précédentes les mécréants se gênaient un peu, devant agir dans la discrétion et trouver des excuses à leurs actes, à présent, non seulement ils ne se sentent pas embarrassés, mais se vantent et se glorifient d'agir contre la Tora, même lorsqu'ils n'ont aucun intérêt - même superficiel - à cela, ainsi qu'il apparaît dans la conduite des Yevsektsie's dans la nation rouge et ailleurs... Des groupes de destructeurs de la foi ont été formés, des "moadones d'apikorsim", et le 'Hafets 'Hayim disait que cette situation est repérable dans le verset (Devarim/Deutéronome 29,18) : " Car je suivrai la passion de mon cœur ", Rachi disant : " Ce que mon cœur voit ". C'est-à-dire que [ces gens diront] telle est leur conception : le meurtrier et le pilleur diront qu'ils ne sont pas des criminels banals, mais des communistes, car c'est cette conception qui leur semble être la bonne. Le verset déclare à leur égard : " L'Eternel ne consentira jamais à lui pardonner ! " (id. verset 19), si le fait de transgresser les paroles de la Tora devient une disposition personnelle globale, c'est une voie bien plus grave que celle de tout autre renégat.

Nous constatons bien ces derniers temps que les coups qui nous frappent, mesure contre mesure, sont eux aussi plus durs : il y a cinquante ans, il y avait des pogroms en Russie, et on savait que c'est le gouvernement qui les organisait, mais c'était fait avec un minimum de pudeur. Les criminels alors étaient encore quelque peu punis, celui qui avait tué devait payer une amende de 4 sous. Ils ne sont tout de même pas arrivés alors au point que leur gouvernement ait un programme officiel de destruction de tous les Juifs. Mais de nos jours, nous voyons bien qu'un peuple connu [on est avant 1939] a pour plan déclaré de décimer tous les Juifs, mesure contre mesure...


Rav El'hanan n'hésite pas à imputer la responsabilité de l'atroce conduite ces Juifs à l'ensemble de la nation juive ; il en fait dépendre la menace qui pesait alors sur l'avenir de la communauté en Russie. On peut mieux comprendre une telle position dans l'optique du 'Hafets 'Hayim rapportée plus haut, admettant que le peuple juif n'aurait pas dû se laisser faire et prendre les armes contre ces odieux ennemis nés en son sein.


Comment comprendre ce phénomène ?

Durant la Choa, il y a eu des kapos, des Juifs qui ont cédé sous la pression et se sont transformés en gardes carcéraux de leurs frères. Rien ne justifie une telle chute, si ce n'est le fait que ces gens étaient dans une situation désespérée, et qu'il était difficile de résister dans de telles circonstances.

Peut-être se souvient-on des Biryonim, ces têtes brûlées du temps de nos Sages, qui ont incendié les réserves de bois et de nourriture qu'il y avait à Jérusalem, pour forcer les Juifs à prendre les armes contre les Romains. Ils allaient en cela contre la position des Maîtres de notre peuple (cf. Guittin 56b et suivantes). Même ces gens n'allaient contre leurs propres Sages que sur le plan politique, ils ne cherchaient pas à renverser la Tora et à suivre un nouvel ordre (bien que sur le plan personnel, ces groupes aient mené une vie très dissolue, sans parler du fait qu'ils n'hésitaient pas à tuer leurs opposants, sans toutefois en faire un principe).


Les Yevsektsie's ont fait quant à eux leurs choix en toute liberté, sans pression aucune. Tout au plus, la facilité et les agréments d'une vie sans problème et sans souci pouvaient les inciter à une telle adhésion. Mais cela semble insuffisant pour comprendre un tel phénomène - qui nous semble ne pas avoir de précédent dans l'histoire du peuple juif, pourtant suffisamment parsemée de périodes horribles.

Il est vrai que ces gens avaient de qui tenir : tout au long du 19ème siècle, les suppôts juifs de la Haskala préféraient suivre la " lumière " qu'ils pensaient trouver chez les Nations et abandonner la Tora
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