Retour triomphal de Benazir Bhutto au Pakistan

Source : http://www.rmc.fr/edito/info/10799/retour-triomphal-de-benazir-bhutto-au-pakistan/

Retour triomphal de Benazir Bhutto au Pakistan

Le 18/10/2007 à 16h17 GMT
par Simon Cameron-Moore et Zeeshan Haider

Citation :

KARACHI (Reuters) - Benazir Bhutto, ancien Premier ministre du Pakistan, est rentrée jeudi dans son pays après huit années d'exil pour conduire son parti dans la campagne des élections législatives en alliée potentielle du président Pervez Musharraf.
"Je suis très enthousiaste, très heureuse et très fière", a-t-elle dit alors que son avion en provenance de Doubaï allait se poser à Karachi, où l'ancien chef du gouvernement était attendu par des dizaines de milliers de ses concitoyens.
"Il nous faut la démocratie au Pakistan", a-t-elle ajouté.
Les autorités, qui craignent que des attentats suicides soient commis par des combattants liés à Al Qaïda ou aux taliban, avaient mobilisé 20.000 agents pour assurer la sécurité.
Alors qu'elle avait promis pendant des années qu'elle retournerait au Pakistan pour mettre un terme à la dictature militaire du général Pervez Musharraf, Bhutto pourrait conclure un accord de partage du pouvoir avec le président pakistanais.
Selon de nombreux observateurs politiques, ce mariage de raison entre deux anciens ennemis semble avoir été soufflé à Musharraf par les Etats-Unis, qui veulent stabiliser cet Etat qui dispose de l'arme nucléaire et qui soutient l'action de l'Orgagisation du Traité de l'Atlantique Nord en Afghanistan.
"JE RÊVAIS DE CE JOUR"
Son avion, qui a décollé de Doubaï avec une heure de retard sur l'horaire prévu, a atterri un peu avant 14h00 locales (09h00 GMT) à Karachi, où plus de 100.000 de ses partisans l'attendaient, se pressant le long de la route qui relie l'aéroport à la ville.
"Je remercie Dieu, je suis très heureuse d'être de retour dans mon pays, ce jour, j'en rêvais", a-t-elle confié à sa descente d'avion.
Des drapeaux rouge-noir-vert du PPP jalonnaient les rues de Karachi, ainsi que des portraits géants de sa dirigeante et de son père, Zulfikar Ali Bhutto, premier chef de gouvernement élu du pays exécuté en 1979 par le général Mohammed Zia-ul-Haq.
Bhutto, qui portait une tunique et de larges pantalons verts, la tête couverte d'un voile blanc, est ensuite montée sur le toit d'un camion blindé pour se rendre en cortège au mausolée du fondateur du Pakistan, Mohammad Ali Jinnah. Mais trois heures après avoir quitté l'aéroport, le convoi n'avait progressé que de 500 mètres tant la foule se pressait aux abords.
Selon les services de renseignement pakistanais, au moins trois groupes djihadistes liés à Al Qaïda ou aux taliban ont menacé de lancer des attaques suicides contre l'ancien Premier ministre.
"Elle a passé un accord avec l'Amérique. Nous porterons nos attaques contre Benazir Bhutto comme nous les avons portées contre le général Pervez Musharraf", a déclaré à Reuters par téléphone satellitaire Haji Omar, chef taliban de la région tribale du Waziristan, à la frontière afghane.
LE RETOUR DE L'HÉRITIÈRE
"En ce moment, je ne pense pas à la mort", a dit Bhutto sur la chaîne Geo Television avant son départ des Emirats. "Je rentre pour le peuple du Pakistan et je suis convaincue que tout se passera très bien."
Avant d'embarquer à bord de l'avion, sans son mari et ses filles qui restent aux Emirats, elle a affirmé que le Pakistan se trouvait "à la croisée des chemins". "Une route conduit à la démocratie, l'autre à la dictature", a-t-elle dit.
Tandis que le Pakistan tout entier semblait comme paralysé par le retour de Benazir Bhutto, Musharraf a passé lui l'essentiel de la journée dans son bureau militaire de Rawalpindi, sans aucun engagement officiel inscrit à son agenda.
Ce retour a été rendu possible par l'abandon des charges de corruption qui pesaient contre elle.
L'ex-chef du gouvernement (1988-90 puis 1993-96) n'exerce plus de pouvoir depuis dix ans. Elle n'a cependant guère perdu de son charisme et, à 54 ans, demeure l'une des femmes politiques les plus connues de la planète.