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| Le Pari de Pascal [topic unique] | |
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Stans Fondateur
Nombre de messages : 16069 Age : 72 Localisation : Bruxelles - Département de la Dyle Langue : français Emploi/loisirs : histoire, politique Date d'inscription : 10/03/2006
| Sujet: Le Pari de Pascal [topic unique] Ven 31 Mar 2006, 8:41 pm | |
| Source : http://www.philagora.net/epistemo/lachelier1.htmDieu: Le pari de Pascal par Jules Lachelier - Citation :
A : L'argumentation de Pascal
1-Nous ne pouvons connaître Dieu
"Notre âme est jetée dans le corps, où elle trouve nombre, temps, dimension... Nous connaissons.., l'existence et la nature du fini, parce que nous sommes finis et étendus comme lui. Nous connaissons l'existence de l'infini et ignorons sa nature, parce qu'il a étendue comme nous, mais non des bornes comme nous. Mais nous ne connaissons ni l'existence ni la nature de Dieu, parce qu'il n'a ni étendue ni bornes." En quel sens l'âme peut-elle trouver dans le corps où elle est jetée -, non seulement dimension, c'est-à-dire étendue, mais encore temps et nombre ? S'agit-il de notre propre corps ou du monde des corps en général ? Le corps ne représente-t-il pas ici, au moins virtuellement, l'ensemble des conditions de la connaissance sensible ? Ce qui suit signifierait alors que nous connaissons ce qui est proportionné, non à notre personne physique, mais à la nature et aux bornes de notre esprit. Quoi qu'il en soit, il y a un point sur lequel la pensée de Pascal devance indubitablement celle de Kant: c'est que nous ne pouvons rien connaître en dehors des données et des conditions de l'expérience. L'infini dont il est ici question, ce sont ces conditions mêmes, espace, temps, nombre, étendues par l'imagination et le raisonnement au delà de toutes limites. Nous savons qu'il existe, parce qu'il est immanent à notre esprit; nous ne savons pas ce qu'il est, parce que nous ne pouvons pas le déterminer. Mais, de Dieu, c'est-à-dire d'un objet à la fois infini et transcendant, nous ne pouvons dire, "ni ce qu'il est, ni s'il est." Voilà comment l'existence de Dieu peut devenir, pour Pascal, l'objet d'un pari.
2- Le pari Dieu, et notre vie éternelle contre notre vie actuelle.
"Examinons donc ce point, et disons Dieu est, ou il est pas... Que gagerez-vous?... Il faut parier cela n'est pas volontaire, vous êtes embarqué... Pesons le gain et la perte en prenant croix, que Dieu est." Pour comprendre ce passage, il faut, je crois, suppléer deux propositions que Pascal a sous-entendues, 1° Dieu. s'il est, nous fera jouir dans une autre vie, à moins que nous n'y mettions nous-mêmes obstacle, d'un bonheur infini; 2° Ceux-là seuls pourront jouir de ce bonheur, qui auront renoncé en ce monde à l'amour d'eux-mêmes et aux satisfactions dont il est la source. Existence de Dieu, vie éternelle et renonciation à l'amour-propre, ces trois idées sont indissolublement unies dans l'esprit de Pascal. S'il veut que nous affirmions l'existence de Dieu, c'est parce qu'elle nous permet d'espérer après cette vie un bonheur infini; et il veut que nous l'affirmions pratiquement, en vivant de la seule manière qui ne nous rende pas indignes de ce bonheur. On comprend alors comment il a pu assimiler cette affirmation à un pari ou, d'une manière générale, à un jeu de hasard. Il y a ici un gain en perspective, c'est la vie éternelle; il y a aussi un enjeu, ce sont les plaisirs terrestres dont nous faisons le sacrifice. Il est vrai que, dans les jeux ordinaires, on ne sacrifie pas définitivement sa mise: on n'y renonce que provisoirement et avec la pensée de la retrouver, entière et accrue, dans son gain. Ici au contraire, le sacrifice est irrévocable ce n'est pas le paradis de Pascal qui nous rendra les plaisirs auxquels nous aurons renoncé ici-bas ; il nous donnera plus et mieux sans doute, mais il nous donnera autre chose. Pour rendre la comparaison tout à fait exacte, représentons- nous une loterie dont le lot unique soit une œuvre d'art. L'argent que nous coûte notre billet est bien, cette fois, un argent sacrifié: nous ne le reverrons pas, même si nous gagnons, sous forme d'argent: mais il se retrouvera éminemment, pour parler comme Descartes, dans la valeur du lot. Pascal remarque a plusieurs reprises que nous sommes forcés de parier, soit dans un sens, soit dans l'autre. "Ne point parier que Dieu est", lui fait dire Port-Royal, "c'est parier qu'il n'est pas". Il est facile d'expliquer cette nécessité, sans faire intervenir, comme M. Havet, la crainte de l'enfer. Nous parions que Dieu est quand nous renonçons, en vue du bonheur à venir, aux satisfactions de l'amour-propre. Mais il n'y a pas, à l'égard de l'amour-propre, de neutralité possible: car il nous est naturel, ou plutôt il est notre nature même: ne pas y renoncer par un acte exprès, c'est lui abandonner entièrement la direction de notre vie; c'est donc agir comme si nous n'avions rien à espérer dans une autre; c'est affirmer pratiquement que Dieu n'est pas. Celui qui parie que Dieu est, n'a à craindre, s'il se trompe, que le néant. Celui qui parie que Dieu n'est pas compte, au contraire, sur ce néant: mais que lui arrivera-t-il s'il se trompe et si son âme subsiste après sa mort? Il aura perdu, par sa faute, un bonheur infini, et cette perte sera déjà pour lui un immense malheur. Est-il voué, en outre, à des souffrances positives et, pour parler la langue de la théologie chrétienne, aux peines de l'enfer? On ne peut pas dire que Pascal n'ait pas envisagé cette éventualité: il en parle dans quelques passages qui ne sont pas sans rapport avec notre texte; il n'en parle pas dans ce texte même et ne la fait pas entrer dans les calculs sur lesquels il fonde son pari. Nous n'avons ici devant nous qu'une alternative, celle de la vie éternelle et du néant. " Si vous gagnez, vous gagnez tout; si vous perdez, vous ne perdez rien." Pascal compte cependant les plaisirs de cette vie pour quelque chose, puisqu'il en fait l'enjeu du pari. Dans les calculs qui vont suivre, il les représente par l'unité. Mais ce n'est que pour se conformer à l'opinion commune: car il se réserve de montrer qu'ils sont faux et de nulle valeur. Il anticipe ici sur ce qu'il dira plus tard.
3- Question de principe: quand avons-nous intérêt à parier?
"Voyons. Puisqu'il y a pareil hasard de gain et de perte, si vous n'aviez qu'à gagner deux vies pour une, vous pourriez encore gager. Mais s'il y en avait trois à gagner, il faudrait jouer (puisque vous êtes dans la nécessité de jouer), et vous seriez imprudent, lorsque vous êtes forcé à jouer, de ne pas hasarder votre vie pour en gagner trois à un jeu où il y a pareil hasard de perte et de gain." Ces deux ou trois vies sont, je pense, deux ou trois vies semblables en tout à la nôtre et qui ne feraient que la prolonger: il ne s'agit encore ici pour Pascal que de durée. et non de bonheur. - "Il faudrait jouer (puisque vous êtes dans la nécessité de jouer)." Expression négligée, mais facile à expliquer. Jouer signifie, la première fois, parier que Dieu est; la seconde, parier dans un sens ou dans l'autre. -Pascal, supposant toujours "pareil hasard de gain et de perte", nous place successivement dans deux hypothèses. S'il y avait, dit-il, deux vies à gagner pour une, nous pourrions parier s'il y en avait trois, nous le devrions. M. Havet blâme cette manière de compter et trouve que nous devrions déjà jouer une vie pour en gagner deux. Mais deux vies à gagner, avec une chance sur deux de les gagner, en valent exactement une. Supposons que ces deux vies soient un lot, et la nôtre, le prit d'un billet: nous échangerons, en prenant ce billet, une valeur égale contre une valeur égale: nous pouvons donc le prendre, sans y avoir cependant aucun intérêt. Mais trois vies à gagner, avec une chance de gain sur deux, en valent une et demie si donc nous ne payons que d'une vie le billet qui peut nous en faire gagner trois, nous serons plus riches de la moitié d'une en prenant ce billet qu'en ne le prenant pas nous avons donc un intérêt évident à le prendre. Le calcul est irréprochable mais où Pascal veut-il en venir avec ses hypothèses ? | |
| | | Stans Fondateur
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| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Ven 31 Mar 2006, 8:42 pm | |
| - Citation :
4- Si nous n'avions qu'une chance contre une infinité?
"Mais il y a une éternité de vie et de bonheur. Et cela étant, quand il y aurait une infinité de hasards dont un seul serait pour vous, vous auriez encore raison de gager un pour avoir deux, et vous agiriez de mauvais sens, étant obligé à jouer, de refuser de jouer une vie contre trois à un jeu où d'une infinité de hasards il y en a un pour vous, s'il y avait une infinité de vie infiniment heureuse à gagner." Ce passage, que Port-Royal a supprimé, n'est pas facile à entendre. Pris à la lettre, il est à la fois incohérent et absurde. Personne ne consentirait à jouer "un pour avoir deux", ni même "une vie contre trois", avec une seule chance de gain contre un nombre infini de chances de perte. Et, lorsqu'on voit ces deux manières de jouer associées, l'une, à la perspective d'une "éternité de vie et de bonheur", l'autre, à celle d'une "infinité de vie infiniment heureuse", on se demande quel peut être, de part et d'autre, le lien qui unit des idées aussi différentes. Tout le mal vient, je crois, d'une rédaction précipitée, dans laquelle Pascal a confondu ce qu'il ne voulait que rapprocher: ses calculs de tout à l'heure, purement imaginaires et simplement préparatoires; et ceux de maintenant, encore en partie hypothétiques, mais dans lesquels commencent à apparaître les véritables données de son pari. Il suppose d'abord, ce qu'il n'admet pas en réalité, que le nombre des chances est infini et qu'il n'y en a qu'une en notre faveur. L'enjeu est toujours pour lui "une vie", notre vie actuelle. Le gain est représenté successivement par deux expressions que l'on aurait tort de prendre dans un sens vague et de regarder, par suite, comme équivalentes. La première est "une éternité de vie et de bonheur"; elle signifie, selon moi, trois choses: 1° Une vie de longueur ordinaire; 2° Un bonheur pareil à celui dont nous jouissons par moments, mais sans intermittence pendant toute la durée de cette vie; 3° La multiplication de cette durée par l'infini. La seconde expression est "une infinité de vie infiniment heureuse". Aux trois éléments contenus dans la première, celle-ci en ajoute un quatrième, l'infini, en quelque sorte, intensif, la grandeur infinie du bonheur à venir dans chaque instant de sa durée. Tout cela posé, voici les nouveaux calculs de Pascal, analogues, comme on va voir, aux anciens. Soit d'abord "une éternité de vie et de bonheur" à gagner, avec une seule chance favorable et un nombre infini de chances contraires. L'infini contenu dans ce dernier nombre et celui qui mesure la durée de la vie à venir s'éliminent, et il reste, à chances égales, une durée de vie ordinaire, plus un bonheur inaltérable. Soit ensuite à gagner, sous même condition, "une infinité de vie infiniment heureuse". Eliminons à la fois l'infini qui exprime le nombre des chances défavorables, et l'un des deux coefficients infinis de notre félicité future: il reste, à chances égales, vie et bonheur, comme dans le cas précédent, plus la multiplication de ce bonheur par un infini, soit de degré, soit de durée. Le jeu est donc bien, comme tout à l'heure, de un pour deux, dans un cas, et de un pour trois, dans l'autre: nous pouvons donc jouer, dans le premier, et nous le devons, dans le second, si l'on ne tient compte que du nombre et non de la valeur des quantités engagées: car le bonheur vaut plus que la vie, et un bonheur infini, infiniment plus. Voilà, si je ne me trompe, ce que Pascal a renfermé dans une phrase elliptique à l'excès, où ses deux ou trois vies imaginaires ne reparaissent que pour figurer deux ou trois des éléments dont il compose notre véritable destinée. Cette interprétation me semble à moi-même forcée: mais le texte en comporte-t-il une qui ne le soit pas ?
5- Avantage du pari.
"Mais il y a ici une infinité de vie infiniment heureuse à gagner, un hasard de gain contre un nombre fini de hasards de perte, et ce que vous jouez est fini. Cela ôte tout parti, etc." Voici enfin les véritables termes du pari, infiniment plus avantageux que tous ceux que Pascal a imaginés jusqu'à présent. Le gain, c'est une vie de bonheur multipliée par deux infinis, l'un de degré, l'autre de durée. L'enjeu, c'est notre vie actuelle, médiocre, simple unité de durée; enfin le nombre des chances favorables est égal à celui des chances contraires. Seulement Pascal, je ne sais pourquoi, se sert ici d'expressions que l'on croirait destinées à affaiblir sa thèse. Il avait mis d'abord "autant de hasard de gain que de perte"; il nous montre un peu plus loin "le gain... aussi prêt à arriver que la perte" et il a mieux aimé mettre "un hasard de gain contre un nombre fini de hasards de perte". Il avait représenté jusqu'ici notre vie actuelle par l'unité; il la traite, quelques lignes plus bas, de "néant": cependant il se contente de remarquer que ce que nous jouons est fini. Il n'insiste même pas sur la valeur infiniment infinie qu'il reconnaît à la vie à venir; et il conclut simplement qu'en présence d'un gain infini, d'un enjeu fini et d'un nombre fini de chances de perte, il serait déraisonnab1e de ne point parier. "Car il ne sert de rien de dire qu'il est incertain si on gagnera, et qu'il est certain qu'on hasarde, et que l'infinie distance qui est entre la certitude de ce qu'on s'expose, et l'incertitude de ce qu'on gagnera, égale le bien fini qu'on expose certainement à l'infini qui est incertain. Cela n'est pas ainsi, etc." La leçon "on s'expose" n'est pas douteuse, et j'adopte entièrement l'explication que M. Havet a donnée des mots de ce que. "La certitude de ce qu'on expose" (c'est la leçon de Port-Royal) signifierait la possession assurée de la chose que l'on va risquer: "la certitude de ce qu'on s'expose signifie la certitude de ce fait, que l'on court un risque: et il suffit de lire attentivement le texte pour se convaincre que l'intention de Pascal est bien d'opposer cette certitude à l'incertitude d'un autre fait, qui est celui de gagner. Voici, en effet, l'objection qu'il s'adresse à lui-même et qui est peut-être plus grave qu'il ne croit. On veut que je renonce aux plaisirs de ce monde pour m'assurer un bonheur infini dans un autre. Le sacrifice est minime peut-être, mais certain; l'avantage que l'on m'offre en échange est immense, mais incertain or l'incertitude diffère toto genere de la certitude et vaut infiniment moins: un bien infini que je ne posséderai peut-être jamais ne vaut donc pas plus pour moi, si même il vaut autant, que le bien fini que je sacrifie. La réponse est facile, si les conditions du pari de Pascal sont réellement celles d'un jeu de hasard. L'incertitude du gain, dans ces conditions, n'est pas quelque chose d'absolu et d'hétérogène à la certitude: il y a entre l'une et l'autre une commune mesure, qui est le nombre total des chances. Si j'avais pris tous les billets d'une loterie, je serais certain de gagner le lot. S'il y en a cent et si je n'en ai qu'un, il s'en faut de beaucoup, sans doute, que je sois certain de gagner: mais il ne s'en faut pas infiniment: car mon incertitude vaut précisément un centième de certitude. Il est donc possible que la valeur du lot, multipliée par cette fraction, c'est-à-dire réduite au centième soit encore supérieure à celle de ma mise, multipliée par l'unité, qui représente la certitude. Et si la valeur intrinsèque du lot est infinie, elle surpassera toujours infiniment celle de ma mise, qui ne peut être que finie (le nombre des chances étant lui-même supposé fini). "S'il y a autant de hasards d'un côté que de l'autre, le parti est à jouer égal contre égal." Port-Royal a mis "la partie est à jouer". "Le parti est à jouer" signifie probablement la même chose que "le parti est de jouer", c'est-à-dire, il est juste et raisonnable de jouer. Si deux personnes jouent l'une contre l'autre avec des chances égales de gain, il est juste que leurs mises soient égales. "Quel mal vous arrivera-t-il en prenant ce parti? Vous serez fidèle, honnête, humble, reconnaissant, bienfaisant, sincère, ami véritable. A la vérité, vous ne serez point dans les plaisirs empestés, dans la gloire, dans les délices; mais n'en aurez-vous point d'autres?" L'homme "fidèle", dans la langue de Pascal, est ce que nous appelons aujourd'hui l'homme sûr, celui sur la parole duquel on peut compter. L'homme "honnête" est l'homme poli. "La gloire" signifie, je pense, l'état intérieur de celui qui se glorifie, l'ivresse de l'orgueil. -On ne peut nier que le pari de Pascal ne soit, comme tout pari, un acte intéressé: mais il faut aussi reconnaître, d'abord, que l'intérêt qui s'y attache n'est pas d'ordre sensible, et ensuite, que l'affirmation pratique dans laquelle il consiste n'est autre chose que la pratique de toutes les vertus. | |
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| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Ven 31 Mar 2006, 8:45 pm | |
| - Citation :
- B : Critique du pari
6- Le Dieu de Pascal, la vie éternelle et le renoncement au moi.
Le pari de Pascal, ou plutôt le raisonnement par lequel il le justifie, est-il logiquement irréprochable ? " L'instinct ", dit M. Havet, " avertit qu'il doit y avoir un défaut dans cette démonstration étrange, mais on a de la peine à le démêler. " Il ne saurait être question de fautes de calcul mais n'y a-t-il pas un sophisme caché dans les données du calcul ? Ces données sont, d'une part, le rapport des chances de gain aux chances de perte, qui paraît être, pour Pascal, un rapport d'égalité; de l'autre, les trois idées, inséparables avons-nous dit, dans sa pensée, de Dieu, de la vie éternelle, et du renoncement à nous-mêmes." On pourrait demander d'abord si ces trois idées sont inséparables. Ne serait-il pas possible, par exemple, que Dieu fût et que nous n' eussions cependant rien à espérer après cette vie ? Poser cette question serait, je crois, mal comprendre Pascal ou, en tout cas, son pari. Le Dieu pour lequel il nous propose de parier n'est pas celui qui a créé le monde et en qui subsistent les vérités géométriques: c'est celui qui nous aime, celui qui veut nous sauver et nous rendre éternellement heureux. La vie éternelle, d'autre part, n'est pas un état de félicité, en quelque sorte, physique, dont Dieu pourrait être la cause, sans en être en même temps la matière: c'est l'union de notre âme avec Dieu, c'est Dieu même, de caché devenu visible et présent à notre conscience. Il n'y a donc pas là, en réalité, deux idées, mais une seule, qui est celle de notre béatitude. Le gain attaché au succès du pari est l'objet même du pari. Demandera-t-on maintenant s'il y a un rapport nécessaire entre le gain et l'enjeu, si nous ne pouvons vraiment parvenir à la vie éternelle qu'en renonçant au monde et à nous-mêmes ? Sans doute, si cette vie ne devait être qu'une sorte de revanche de la nature sur la mort, le triomphe définitif de notre moi, mis désormais à l'abri des atteintes du temps, on ne voit pas pourquoi nous ne pourrions nous y préparer qu'en renonçant à nous-mêmes: ce serait le cas, au contraire, de nous aimer sans réserve, puisque nous serions assurés de ne jamais nous perdre. Mais il n'en est pas de même si elle doit consister dans l'union de notre âme avec Dieu: car, dans le tout que nous formerons alors avec lui, notre moi comptera pour bien peu de chose, si tant est qu'il soit encore quelque chose et ne s 'évanouisse pas en participant de l'infini. On comprend alors que la condition de notre félicité future soit la renonciation à l'amour-propre: car celui qui fait de lui-même son centre et son tout refuse, en quelque sorte, d'avance, d'être uni a Dieu et de vivre de la vie divine. Qui cherche son âme, dit l'Evangile, la perdra.
7- Le problème: la possibilité de la vie éternelle
Ce n'est donc pas là qu'est la difficulté, s'il en a une. Mais que vaut, au point de vue de la légitimité du pari, l'idée unique sur laquelle il nous parait maintenant porter, celle de la vie éternelle? Il ne s'agit pas de savoir si cette idée correspond à un objet réel: si nous étions en état de résoudre cette question, nous ne serions pas réduits à parier. Mais nous avons au moins besoin de savoir si l'objet de cette idée est possible car, s'il ne l'était pas, il serait inutile de nous demander combien il y a de chances pour qu'il existe. Nous suffira-t-il cependant de savoir que cet objet n'est pas impossible? Et ne pourrait-il pas y avoir plusieurs genres de possibilité, tels que le calcul des chances ne fût applicable qu'à l'un d'eux? Avant de demander si une chose peut exister, nous devons demander si elle peut être conçue, c'est-à-dire si elle n'implique pas contradiction; si elle satisfait à cette condition, nous dirons qu'elle est logiquement possible. Mais, de ce qu'une chose est logiquement possible, s'ensuit-il qu'elle le soit aussi réellement et qu'elle soit prête, en effet, à exister? Une chose qui ne porte pas en elle-même d'obstacle à son existence, ne se met pas pour cela d'elle-même en possession de l'existence: nous ne devons donc la tenir pour réellement possible que si nous connaissons des raisons positives pour qu'elle existe ou, en d'autres termes, des causes déterminées à la produire. Est-ce à dire qu'avant de déclarer un événement possible, il faille nous assurer que toutes les conditions physiques dont il dépend sont ou vont être réalisées? Nous aurions, dans la plupart des cas, fort à faire, et le succès même de notre recherche se tournerait pour elle en échec car cet événement nous paraîtrait alors, non plus possible, mais nécessaire. Ce n'est pas du point de vue des causes efficientes qu'une chose peut être regardée comme réellement possible: c'est du point de vue des causes finales ou, ce qui revient au même, des formes et des genres. Un événement fait toujours partie d'un genre, créé, soit par la nature, soit par nous-mêmes; et il peut prendre, dans les limites de ce genre, un nombre déterminé ou indéterminé de formes particulières, que nous connaissons, dans certains cas, à l'avance, et qui échappent, dans d'autres, à toute prévision précise. Une boule va être tirée d'une urne où il y en a plusieurs: voilà l'événement sous sa forme générale; et nous savons que cet événement peut prendre autant de formes particulières qu'il y a de boules dans l'urne. Un enfant va naître: il sera certainement garçon ou fille; quant aux traits de son visage, à la couleur de ses yeux et à celle de ses cheveux, tout ce que nous savons de ces détails, c'est qu'ils peuvent varier, quoique entre des limites assez étroites, à l'infini. Et, quand nous prononçons ici le mot pouvoir, nous ne voulons dire qu'une chose: c'est que toutes ces spécifications de l'événement du tirage ou de celui de la naissance sont virtuellement contenues dans ce même événement, conçu sous sa forme générale et posé, sous cette forme, comme une fin. Nous savons très bien qu'en voulant, d'une manière générale, le tirage, nous avons voulu éventuellement la sortie de chacune des boules que nous avons, en vue de cette sortie même, mises dans l'urne. Nous ne sommes pas dans le secret de la nature, mais nous supposons qu'elle agit comme nous et que, lorsqu'elle veut la naissance d'un être humain, elle veut en même temps, d'une volonté implicite et virtuelle, chacun de ses modes particuliers d'organisation. Voilà pourquoi ces modes nous paraissent possibles; et quant aux causes physiques qui déterminent l'existence effective de l'un d'eux plutôt que de tous les autres, leur intervention constitue simplement à nos yeux ce que nous appelons le hasard. Est réellement possible, en définitive, toute spécification d'un genre existant. Cette distinction faite, quelle sorte de possibilité pouvons-nous reconnaître à l'objet du pari de Pascal? En fait, et pour Pascal lui-même, l'idée de la vie éternelle fait partie de la tradition chrétienne: en droit, et pour l'incrédule auquel il la propose, elle se présente comme un concept librement formé par notre esprit, sans modèle, mais aussi sans garantie dans l'expérience. On peut donc demander à ce concept de ne pas se détruire lui-même, et l'on accordera volontiers à Pascal qu'il satisfait à cette condition. Mais on ne peut pas s'attendre à ce qu'il soit l'expression d'une possibilité réelle: car, à moins qu'il ne s'agisse d'événements artificiels et créés par nous-mêmes, il n'y a que l'expérience qui nous instruise de ce qui peut réellement arriver. Que pourrait être, d'ailleurs, pour nous la possibilité réelle d'un objet situé, par hypothèse, hors de la nature? Sur quel fondement pourrait-elle reposer, et à quel signe pourrions-nous la reconnaître? Quel genre, donné sous une forme en ce monde, pourrait être susceptible, dans un autre, d'une nouvelle forme, à la fois analogue et différente? Pascal semble bien, du reste, ne s'être posé aucune de ces questions et s'être contenté, pour l'objet de son pari, de la possibilité logique. | |
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| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Ven 31 Mar 2006, 8:47 pm | |
| - Citation :
8- Nous ne pouvons parier pour une vie éternelle logiquement possible.
Or, le calcul des chances n'est pas même applicable à tous les cas, mais seulement à certains cas choisis, de possibilité réelle. Ces cas sont ceux dans lesquels les possibilités, rigoureusement déterminées en nombre et en nature, sont, de plus, égales ou commensurables entre elles. S'il y a 100 boules dans une urne et si l'on doit en tirer une, je sais qu'il y a, pour la sortie de chaque boule particulière, une chance contre 99. Si les données de Laplace sont encore vraies aujourd'hui, je puis raisonnablement parier 22 contre 21 que l'enfant qui va naître sera un garçon. Mais dans un cas de possibilité logique, il ne saurait être question de chances: car des chances ne sont autre chose que des possibilités réelles, ou les droits rivaux de ces possibilités à l'existence effective. Un simple concept n'a ni peu, ni beaucoup, de chances de devenir un objet réel: il n'est ni près, ni loin, du seuil de l'existence: il est d'un autre ordre et sans rapport nécessaire avec elle. Il se peut qu'il y ait dans la réalité un objet auquel il corresponde, il se peut qu'il n'y en ait aucun; aucune raison tirée de ce concept même ne peut nous l'apprendre: il faut attendre que l'expérience prononce et dire, en attendant, que nous n'en savons rien. De ce que nous ne sommes pas plus autorisés à nier l'existence d'une chose qu'à l'affirmer, il ne faut donc pas conclure, comme semble avoir fait Pascal, qu'il y a une chance sur deux pour que cette chose existe. Il n'est pas admissible qu'une entière ignorance à l'égard de la réalité constitue par elle-même un renseignement précis sur la réalité. L'incertitude qui résulte pour nous de cette ignorance n'est, n une moitié, ni une fraction quelconque de certitude: c'est une incertitude absolue, absolument hétérogène à la certitude. Pascal a été au devant de l'objection et a cru en triompher en invoquant l'exemple des jeux de hasard. L'espérance d'un gain, lorsqu'elle repose sur un fondement réel, forme avec la valeur intrinsèque de ce gain un produit toujours moindre que cette dernière, mais toujours positif et dans lequel la grandeur de l'une peut compenser indéfiniment la faiblesse de l'autre. Mais, ici, l'incertitude du bien espéré n'a pas seulement pour effet d'en diminuer la valeur: elle lui ôte toute valeur positive, puisqu'elle porte sur la question de savoir si ce bien, quel qu'il puisse être, appartient au domaine de la réalité ou à celui de la chimère. Qu'on le multiplie par autant d'infinis qu'on voudra, on n'en sera pas plus avancé, puisqu'il restera toujours à savoir si le produit de ces multiplications est réel ou chimérique. Le sophisme est manifeste si l'espoir du bonheur à venir ne repose que sur une possibilité logique, il faut renoncer au pari de Pascal.
9- La raison et la liberté dépassement de notre vie spirituelle actuelle.
Mais comment pourrait-il reposer sur une possibilité réelle? Il faudrait pour cela, avons-nous dit, qu'un genre, donné sous une forme particulière en ce monde, fût susceptible, dans un autre, d'une spécification nouvelle, à la fois analogue et différente. La supposition nous a paru absurde; et elle l'est en effet, à moins que, par une exception probablement unique, il ne nous soit possible, d'abord, de saisir ce genre en dehors de sa forme particulière, à l'état, en quelque sorte, de pure idée, et ensuite, de constater qu'il est en lui-même indépendant des conditions de l'existence sensible et susceptible, par conséquent, d'une réalisation supra-sensible. L'exception n'est pas elle-même facile à concevoir: est-ce à dire cependant qu'elle n'existe pas? Il y a dans notre conscience un élément singulier, difficile à définir, moitié fait, moitié idée: c'est ce qu'on peut appeler à peu près indifféremment raison ou liberté. Cet élément nous est donné chaque fois que nous pensons ou que nous voulons, non pas, il est vrai, à l'état pur, mais toujours combiné avec un phénomène sensible de représentation ou d'inclination. Mais nous pouvons, par un effort de réflexion, l'isoler et le saisir en lui-même; et nous constatons alors qu'il est tout à fait disproportionné à ce phénomène, si bien qu'il y a, entre la forme et la matière de chacun de nos actes intellectuels, non pas harmonie, mais désaccord et presque contradiction. Toutes les fois par exemple, que nous portons un jugement, nous témoignons, par l'emploi même du verbe être, que nous entendons énoncer ce qui est vrai en soi et doit être admis comme tel par toutes les intelligences: et cependant notre jugement n'exprime que ce que nous avons perçu et imaginé, c'est-à-dire des apparences relatives à notre sensibilité et à notre point de vue sur l'univers. Il en est exactement de même d'un acte de volonté: nous voulons toujours, en principe, ce qui est, en soi et aux yeux de la pure raison, le meilleur: nous voulons toujours, en fait, ce que nos inclinations et notre imagination, agissant de concert, nous représentent comme le meilleur, quoique ce soit quelquefois, en réalité, le pire. La raison et la liberté débordent donc manifestement notre conscience actuelle: elles sont en nous l'idée en partie indéterminée, le cadre à moitié vide, d'une vie spirituelle qui ne se réalise que très imparfaitement en ce monde et qui pourrait se réaliser beaucoup mieux dans un autre, si, tous les éléments sensibles de la conscience ayant disparu, la matière des actes intellectuels devenait adéquate à leur forme. Ce que serait, pour notre esprit, cette vie nouvelle, c'est ce qu'il serait absurde de vouloir imaginer, puisqu'elle exclut, par hypothèse, tout ce qui est actuellement imaginable: qu'elle soit réellement possible, c'est ce dont nous ne devons pas douter, puisqu'elle n'est que la spécification éventuelle d'un genre dont nous saisissons en nous-mêmes l'existence. En fait, nous la croyons possible et nous y aspirons sans la connaître: ne pouvant bannir de notre conscience les éléments sensibles, nous cherchons du moins à en restreindre le rôle: nous faisons plus de cas d'une vérité générale que d'une vérité particulière, d'une connaissance a priori que d'une connaissance empirique; la conduite dont nous nous honorons le plus est celle à laquelle notre intérêt a le moins de part et dont le motif est le plus étranger à notre nature sensible. La religion est l'orientation de notre vie entière vers l'au-delà; l'ascétisme et le mysticisme sont un effort généreux, mais téméraire, à présent la barrière qui nous en sépare.
10- Conclusion: raison et vie religieuse.
Il n'y a là cependant aucune preuve de la réalité d'un avenir ultra-terrestre. Il est possible que notre activité intellectuelle s'exerce un jour sous une forme beaucoup plus parfaite que celle dont nous avons actuellement conscience. Il est possible que nos facultés supérieures soient destinées à trouver, dans un autre ordre d'existence, un objet adéquat à elles et qu'elles soient ici-bas dans un état d'attente et d'inutilité provisoire, comme les organes de la respiration pendant la vie intra-utérine. Mais il est possible aussi qu'il ne doive jamais y avoir pour nous, ni bien intelligible, ni intuition intellectuelle. Il est possible que la raison et la liberté, dans ce qu'elles ont de disproportionné à notre conscience sensible, n'aient d'autre rôle à remplir que de la stimuler et de nous pousser à étendre toujours plus loin les vues de notre esprit et à élever toujours plus haut les motifs de notre conduite. Il vaudrait mieux, sans doute, qu'il en fût autrement: mais quelle nécessité y a-t-il à ce que le meilleur soit ? La nature, il est vrai, semble s'être fait une loi de le réaliser: mais pourquoi cette loi de la nature serait-elle encore valable hors de la nature ? En présence d'un idéal qui n'est pas arbitraire, qui répond à un besoin subjectif de notre raison, et dont elle est cependant impuissante à établir la valeur objective, que reste-t-il, sinon de croire, d'espérer ou, comme le propose Pascal, de parier ? Peut-il être question, ici, de chances ? Nous sommes en présence d'une possibilité réelle, mais d'une seule ; et la question n'est pas de savoir, de plusieurs possibilités, laquelle se réalisera, mais si cette possibilité unique se réalisera ou ne se réalisera pas. Peut-être pourrions-nous dire qu'il y a une chance pour qu'elle se réalise, mais qu'il y en a une aussi pour qu'elle ne se réalise pas, et que nous ne savons, de ces deux chances, laquelle est la plus forte. Que la réalisation de cette possibilité soit pour nous un bien, qu'elle soit même notre bien suprême, c'est ce dont nous ne pouvons pas douter, puisqu'elle répond à une tendance de ce qui, en nous, est le plus nous-mêmes : nous dirons aussi que ce bien est infini, puisqu'il est suprasensible et que le sensible nous paraît être la condition du fini; mais nous le dirons dans un sens qualitatif plutôt que quantitatif, qui exclura toute idée de degré et de durée. L'enjeu du pari sera pour nous, comme pour Pascal, le sacrifice du moi; mais nous n' oublierons pas que ce sacrifice s'impose à nous, même en dehors de toute espérance, et par cela seul que le moi se rencontre, dans notre conscience actuelle, avec la raison. Quand l'absolu ne pourrait jamais être pour nous qu'une idée, nous devrions encore attacher plus de prix à cette idée qu'à la réalité sensible tout entière, et agir exclusivement par raison, comme les Stoïciens, sauf à emprunter, comme eux, à la nature, la matière et les motifs particuliers de notre action. Seulement il nous en coûtera moins de sacrifier à la raison notre volonté de vivre, si la raison elle-même doit être en nous le principe d'une vie nouvelle, plus parfaite et plus heureuse. La question la plus haute de la philosophie, plus religieuse déjà peut-être que philosophique, est le passage de l'absolu formel à l'absolu réel et vivant, de l'idée de Dieu à Dieu. Si le syllogisme y échoue, que la foi en coure le risque ; que l'argument ontologique cède la place au pari. Jules Lachelier, Revue philosophique, Juin 1901. | |
| | | Alexis Modérateur
Nombre de messages : 1743 Age : 36 Localisation : Bruxelles Emploi/loisirs : Etudiant Date d'inscription : 13/03/2006
| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Sam 01 Avr 2006, 10:37 am | |
| Si vous me le permettez Stans, je posterai ici le Pari de Pascal en simplifié : - Citation :
- Dieu existe-t-il ? Le mathématicien et philosophe Blaise Pascal démontre qu’il valait mieux croire en Dieu car c’était un bon pari !
En fait, Pascal n’analyse que le cas du christianisme en considérant dans un premier temps qu’il y a une chance sur deux pour que Dieu existe.
Deux possibilités sont à choisir, bien que Pascal n’étudie que le 1er cas :
1er cas : Tu fais le choix d’être chrétien :
Si Dieu n’existe pas, tu sombres dans le néant =0 avec une probabilité de ½ : ½ x 0 = 0
Si Dieu existe, tu vas au Paradis pour l’éternité =infini avec une probabilité de ½ : ½ x infini = infini
Valeur estimée de faire le pari d’être chrétien : infini
2ème cas : Tu fais le choix d’être athée :
Si Dieu n’existe pas, tu sombres dans le néant =0 avec une probabilité de ½ : ½ x 0 = 0
Si Dieu existe,tu vas en enfer pour l’éternité =(- infini) avec une probabilité de ½ : ½ x (- infini) = (- infini)
Valeur estimée de faire le pari d’être athée : (- infini)
En considérant que la probabilité de l’existence de Dieu est inférieure à ½, on obtient les mêmes résultats. En effet, si cette probabilité est par exemple égale à 1/100 000, la valeur estimée de faire le pari d’être chrétien serait :
Si Dieu n’existe pas : 99999/100000 x 0 = 0 Si Dieu existe : 1/100000 x infini = infini
Estimation : infini | |
| | | Stans Fondateur
Nombre de messages : 16069 Age : 72 Localisation : Bruxelles - Département de la Dyle Langue : français Emploi/loisirs : histoire, politique Date d'inscription : 10/03/2006
| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Sam 01 Avr 2006, 3:37 pm | |
| Excellent résumé mais je tenais à mettre le texte in extenso pour les amateurs de réflexion ! | |
| | | Ardennais Cofondateur
Nombre de messages : 3518 Age : 58 Localisation : Grasse (Alpes-Maritimes) Langue : français Emploi/loisirs : enseignant Date d'inscription : 20/04/2009
| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Sam 25 Avr 2009, 10:52 am | |
| Bonjour à tous! Quel bonheur! J'ai longtemps souhaité exposer mes vues sur le pari de Pascal, mon vœu est exaucé! Je dois d'abord vous livrer ma première expérience du sujet: c'était en cours de français au collège. Le professeur nous avait averti que nous allions étudier un extrait de l'œuvre d'un génie, et nous a entretenu longuement et avec une jouissance ostentatoire du chef d'œuvre des chefs d'œuvre de la pensée humaine, insurpassable Himalaya de la production intellectuelle! Las! Quelle ne fut pas ma déception : étant tout jeune adolescent déjà enclin au scepticisme permanent, je ne pus, avec l'immodestie du premier de la classe que j'étais, m'empêcher de penser que ce texte certes admirablement écrit et étayé avec force arguments était sans doute la pire sottise qu'un esprit censé et supérieurement doué ait pu produire. Je ressentais confusément que le raisonnement devait comporter une faille en quelque endroit, sans arriver à discerner clairement laquelle et où. Je restais décontenancé par mon incapacité à la détecter et incrédule quant à l'admiration que ce texte avait suscité chez mon professeur et des générations entières de gens intelligents et cultivés. Le pari de Pascal m'a hanté de nombreuses années durant. Il n'est point besoin de recourir aux statistiques pour démonter le bel édifice de l'inventeur de la calculatrice et de la brouette: ce ne sont pas les étages de la démonstration qui sont fragiles, mais les fondations elles-mêmes qui sont branlantes, car construites sur le sable des fausses certitudes. On oublie simplement que Pascal, aussi intelligent et méthodique qu'il fût, ne sut s'extraire entièrement du cadre de pensée dominant à son époque (le peut-on d'ailleurs?) et ne disposait pas des données que l'avancée des sciences exactes et humaines nous fournit aujourd'hui. Parmi les présupposés qui faussent la démonstration de Pascal, on peut citer: - L'existence d'une âme séparée du corps, car par essence de nature différente: sans aller jusqu'à évoquer le doute que certains peuvent émettre quant à l'existence de l'âme, concept pour le moins flou et objet d'interprétations diverses sinon contradictoires d'une tradition spirituelle à une autre, on peut mettre en doute cette distinction radicale: la thèse défendue dans l'ouvrage du(des) docteur(s) Damasio ( justement intitulé "L'erreur de Descartes"!) permet de la remettre fortement en question. (Fascinant cas clinique de l'accident de Phineas Gage, qui a endommagé l’aire frontale de son cerveau, laissant toutes ses facultés intellectuelles absolument intactes mais métamorphosant du tout au tout sa personnalité en annihilant les hautes qualités morales que tous s'accordaient à lui reconnaître!) - L'existence d'un monde "au-delà" de la matière: Découlant directement de l'impression instinctive (très prégnante mais certainement trompeuse) décrite ci-dessus de l'indépendance foncière de l'esprit par rapport à la matière, elle devient très hypothétique lorsqu'on s'aperçoit que la séparation esprit-corps n'est pas aussi franche, voire n'existe probablement pas. (cartographie des aires du cerveau, maladies psychosomatiques, connaissance des neurotransmetteurs,etc.) - L'excessive confiance accordée à certaines thèses défendues par le(s) clergé(s) ,telles celles énoncées plus haut, et largement répandues dans la société de l'époque: existence d'un paradis et d'un enfer (mais quid du purgatoire?), destin posthume de l'âme selon le principe de la rétribution des actes, qualités de Dieu telles qu'énoncés par les théologiens, etc. Ce qui induit immanquablement un raisonnement tautologique du style: "Je crois en Dieu car mon livre sacré dit qu'il existe, et je crois que ce livre sacré dit la Vérité car c'est Dieu lui-même qui l'a dicté"! Mais le plus beau, c'est qu'il n'est même pas nécessaire de contester la véracité de ces présupposés pour rejeter l'option que Pascal nous invite à adopter. Il suffit d'utiliser des arguments théologiques de base pour prendre le contre-pied du grand penseur: si Dieu est en effet tel que les monothéismes le décrivent, il est Unique, Infini, Eternel, Créateur de l'Univers, Omnipotent, Omniscient et immensément Bon et Miséricordieux. Tout ce qui existe, y compris mon scepticisme ou mon athéisme, a donc été voulu par lui de toute éternité. Le nier ou le relativiser par des sophismes théologiques du genre: "Dieu s'est mis en retrait de sa création et a donné la liberté à l'Homme de choisir entre le Bien et le Mal" est une imposture, car si Dieu nous permet le choix réellement libre, il n'est plus ni omnipotent ni omniscient, et s'il se retire (mais où???) ainsi que l'ont imaginé les hermétistes gréco-égyptiens ou certains gnostiques, il n'est plus infini. Dieu n'étant plus Dieu puisque ayant perdu les qualités qui le définissent, pourquoi lui rendre un culte et lui adresser des prières qu'il ne pourra peut-être même pas exaucer, ayant renoncé à une partie de sa toute-puissance ? Mais en admettant qu'il est bien omnipotent et omniscient, pourquoi me refuserait-il le paradis pour des actes ou des pensées dont je ne suis pas responsable, puisque lui seul en est la cause? Cela reviendrait à dire qu'il est cruel, or Dieu est censé être bon et miséricordieux, nous l'avons vu! Et si Dieu est bon, d'où vient le mal? Du Diable? Mais l’ange déchu n’est-il pas lui aussi une créature de ce Dieu omnipotent et omniscient ? Le Mal trouverait ainsi sa source dans un Dieu de bonté, ce qui est pour le moins paradoxal ! Ou alors, le Diable agit de son propre chef, sans rendre de compte à son créateur qui perd ainsi une fois de plus sa toute-puissance en tenant à demeurer bienveillant… à moins que le Mal trouve en lui-même sa propre source, auquel cas le Dieu bon n’est plus l’unique Principe régissant le monde et nous devons alors accepter les vues des Gnostiques et autres Cathares et jeter le monothéisme aux orties…Il faut bien les trésors d’arguties échafaudés pendant des siècles par les théologiens pour donner un semblant de cohérence à ce qui ne peut en avoir. A bout d’arguments convaincants et devant nos objections répétées, il est fort probable qu’on nous resserve alors l'habituelle et bien commode sentence "Les desseins de Dieu sont impénétrables" et autres billevesées permettant de se dédouaner facilement de tout effort de réflexion véritable. Mais je me suis éloigné du cœur de notre sujet pour mieux y revenir : je vous invite à présent à prendre en ma compagnie le pari suivant (que j’appellerais en toute modestie « le pari d’Ardennais ») et que je vous expose de manière succincte. «Concernant le salut de l’âme, si je suis un honnête homme, il n’y a aucun avantage à tirer ni d’une pratique ni d’une croyance religieuses car de deux choses l’une: • soit Dieu existe et il est tel qu’on nous l’enseigne, et dans ce cas tout ce qui est procède de sa volonté, et dans son infini bonté il ne saurait me refuser la vie éternelle au motif d’actes ou de pensées dont je ne suis pas réellement responsable ; et quand bien même il m’accorderait la liberté d’action, étant Dieu d’Amour infiniment miséricordieux, il ne me punira pas si j’agis avec droiture et humanité sans toutefois adhérer à un culte ou une croyance particuliers. Sans croire en lui mais vivant selon les règles morales communément partagées par les fidèles et les incroyants, le Dieu de bonté ne me tiendra aucune rigueur de ma regrettable erreur puisque au final j’aurai œuvré sans le savoir à la concrétisation de Son Plan. • Soit Dieu n’existe pas, et dans ce deuxième cas, j’aurai fait le bien autour de moi sans qu’une promesse de récompense dans l’au-delà ne m’y oblige. Ni Dieu, ni l’âme, ni la vie éternelle n’existant, je n’aurai pas gaspillé en activités inutiles le précieux temps de vie qui m’est donné et j’aurai ainsi pu consacrer l’essentiel de mon existence à mes semblables. En pariant sur l’inutilité de la croyance en Dieu, je n’ai de la sorte aucune perte à craindre et je jouis par rapport à Pascal du double avantage de n’avoir pas perdu mon temps et d’avoir agi de manière désintéressée. Quelles failles avez-vous trouvé dans mon raisonnement ? Salut et fraternité. | |
| | | Stans Fondateur
Nombre de messages : 16069 Age : 72 Localisation : Bruxelles - Département de la Dyle Langue : français Emploi/loisirs : histoire, politique Date d'inscription : 10/03/2006
| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Sam 25 Avr 2009, 1:19 pm | |
| Prenons d'abord tes présupposés cher ami.
- Tu n'apportes pas l'absolue certitude que nous n'avons pas d'âme puisque tu parles de "flou" mais le concept de flou n'égale pas celui d'inexistant; - "la cartographie des aires du cerveau" ne peut à elle seule balayer d'un revers de la main la possibilité d'un monde "au-delà" de la matière. D'ailleurs qu'est-ce que la matière lorsqu'on s'apperçoit en physique que nous ne sommes constitués que de ... vide ! - le clergé (catholique) n'a fait que reprendre les thèses juives de l'existence d'un Paradis et d'un Enfer (moins décrit cependant dans le judaïsme) mais il a depuis longtemps ajouté le principe de l'existence d'un Purgatoire qui, comme son nom l'indique, est un endroit de purification - fort désagréable au demeurant - où les âmes des défunts pas très parfaits durant leur vie attendent d'avoir compris qu'il leur faut se repentir réellement pour accéder au Paradis. In fine, il ne reste que la voie du Paradis temporaire (celui d'avant la Parousie) ou de l'Enfer éternel en attendant la Parousie, jour où les Élus vivront enfin dans des corps incorruptibles rejoints par leurs âmes dans un Univers paradisiaque qui n'est pas une Terre remodelée. - quant à Dieu l'Unique, il aurait lieu de s'écarter quelque peu - comme le fit Jésus - du modèle Juif où YHVH = D'ieu. Selon moi, et cela n'engage que moi, le YHVH des Juifs n'est qu'un démiurge, voire un thaumaturge, parmi tant d'autres et le Dieu de Jésus-Christ est le Dieu de tous : Il est en nous et nous sommes en lui ; nous sommes tous des étincelles de Dieu mais c'est à nous de découvrir sa véritable nature avant d'évoluer vers un Monde plus parfait que le nôtre (vers une dimension supérieure ?) ou le clivage croyance - incroyance n'aura plus de signification.
Pour conclure, reconnaissons tout de même que le Pari (très cartésien) de Pascal est très difficile à détricotter même pour l'ex-premier de classe que tu étais mon très cher intervenant. | |
| | | Ardennais Cofondateur
Nombre de messages : 3518 Age : 58 Localisation : Grasse (Alpes-Maritimes) Langue : français Emploi/loisirs : enseignant Date d'inscription : 20/04/2009
| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Dim 26 Avr 2009, 4:04 pm | |
| Grasse, 7 Floréal An CCXVII Mon cher Stans, Tu as sans doute lu mon message trop vite, ou bien ne me suis-je pas suffisamment expliqué: il est vrai que je ne voulais pas alourdir davantage un envoi déjà copieux, et garder quelques arguments ou développements par devers moi pour permettre au débat de s'instaurer et mieux étayer mon discours après coup. Laisse-moi te dire amicalement que tu déformes mes propos et que tu ne démontres absolument pas la fausseté de mes assertions. Ce que tu présentes comme mes présupposés ne sont dans mon texte que des doutes, des hypothèses ou des mises en perspective. Ainsi, lorsque tu sembles presque laisser entendre que je pose comme établi que l'âme n'existe pas ; ce n'est pas ce que j'ai écrit! J'ai simplement indiqué que Pascal prenait l'hypothèse inverse, que personne ou presque n'aurait songé à remettre en cause à son époque (à moins de passer pour un inconséquent ou un danger pour la société), pour base de sa réflexion, alors que les avancées des sciences modernes, exactes et humaines, incitent fortement à prendre des distances avec une telle représentation de l'activité psychique. Oui, la notion d'âme a toujours été floue et l'est plus encore aujourd'hui (sauf dans les esprit des fidèles?) et si son inexistence n'est pas prouvée, comme tu l'écris avec justesse, il n'en reste pas moins que les preuves de son existence en tant que telle (c'est à dire une entité constitutive de la personne humaine, radicalement indépendante du corps qui ne serait que son support provisoire) s'amenuisent à chaque nouvelle découverte des sciences cognitives. De sorte que si l'âme existe, il y a gros à parier sa nature réelle ne soit très éloignée de la définition qu'en donnèrent naguère les religions abrahamiques. Dès lors, la démonstration de Pascal s’en trouve fort compromise. Prenons ton objection suivante, elle aussi très légère. Tu prends un exemple isolé de l'hypothèse qu'il est sensé illustrer, celui des données fournies par les progrès de l’imagerie médicale, pour infirmer la possibilité d'en déduire l'inexistence d'un monde autre que le monde sensible, ce que je n'ai jamais voulu insinuer. De là tu glisses une incise vengeresse sur le fait que la matière est essentiellement constituée de vide (Tiens? Je sens poindre une réminiscence de la doctrine bouddhique ou bien de la Gnose de Princeton? ) pour émettre l'éventualité qu'un autre monde serait ainsi possible. Outre que la déduction est pour le moins forcée, car l’apparente vacuité relative de la matière ainsi observée n’indique en rien la présence éventuelle de quelque chose d’une autre nature, permets-moi de te dire que c'est raisonner à l'envers, car la possibilité d'une réalité ne prouve (ni n'infirme, il est vrai ) la réalité d'une possibilité. Dans l'indécision, la plus élémentaire prudence ainsi que l'honnêteté intellectuelle commandent alors, faute de pouvoir trancher de manière définitive, de préférer, pour une période transitoire de durée indéterminée, l'hypothèse la plus "économique" en présupposés. En ce qui concerne l'existence du Paradis, de l'Enfer et du Purgatoire, tu ne fais que reprendre ce qu’en disent les religions sans apporter à aucun moment les connaissances factuelles qui nous autoriseraient à l’accepter pour donnée raisonnable. Au bout du compte, et à moins de se soumettre à l’argument d’autorité du clergé dont j’ai démontré précédemment le peu de crédibilité qu’il fallait lui accorder (parce qu’usant et abusant de raisonnements tautologiques), on ne peut la considérer que pour ce qu’elle est, c'est-à-dire une construction intellectuelle que chacun a loisir d’estimer séduisante ou non, sans qu’il soit possible de se prononcer plus avant. Que l’on imagine, ou plus encore : que l’on espère que le monde phénoménal ne saurait être la totalité de ce qui existe n’implique absolument pas que cette opinion reflète l’exacte compréhension de ce qu’est l’Univers, et n’autorise pas à l’affirmer, quoi qu'en pensent les guénoniens. Ce serait prendre ses désirs pour la réalité et devoir reconnaître que pour des motifs semblables, les matérialistes pourraient bien avoir raison… De plus, face aux questionnements que l’Homme s’est légitimement posés en contemplant l’Univers depuis la préhistoire, que de théories ont été échafaudées! Du stoïcisme à l’existentialisme, du chamanisme à l’Islam, du tantrisme au taoïsme, du confucianisme au rationalisme, etc. autant de possibilités d’interprétation offertes à notre sagacité, autant de doctrines ayant suscité l’adhésion de milliers de nos semblables ; autant en fait de systèmes partageant des similitudes, mais que des différences, des divergences voire des points de vue inconciliables séparent également ! Cette profusion de théories rend très improbable la possibilité qu’aucune d’entre elle ne soit autre chose qu’une explication parcellaire ou approximative du réel, tant que de nouvelles découvertes ne viennent infirmer cette dernière remarque et permettre un tri, voire valider par des observations incontestables une de ces théories (jusqu’à la prochaine remise en question). Partant, il faut bien considérer les dogmes et autres doctrines pour ce qu’ils sont : des jalons dans l’histoire de la recherche de la Vérité par l’Homme, de précieux outils auxquels il faut se garder de donner une confiance aveugle. Rien d’autre. Élaborer un système de pensée, aussi puissamment charpenté soit-il, en prenant pour base une ou plusieurs hypothèses qu’aucun élément concret et incontestable ne vient étayer revient presque à coup sûr à bâtir un gratte-ciel sur des sables mouvants, et c’est là le « péché originel » de toutes les religions. De là, la nécessité de l’argument d’autorité verrouillé par une institution de nature cléricale, et pourtant si incompatible avec une réelle « conversion du cœur ». Quant à tes digressions sur l’identification du Démiurge avec Yahweh, dieu des Juifs, je ne te suivrai pas sur ce terrain miné ! Cette thèse gnostique, donc hétérodoxe du point de vue de l’église officielle, est certes très intéressante car elle permet d’expliquer entre autres le rejet de la Franc-maçonnerie par Rome (Car si le Dieu des chrétiens est le créateur de l’Univers, le Grand Architecte des FFMM ne serait-il pas son inspirateur, donc son « supérieur » ?), elle est pour les mêmes raisons à l’origine de l’antijudaïsme qui a imprégné par capillarité l’Église naissante, antijudaïsme grandement responsable de l’antisémitisme des siècles postérieurs. Est-la doctrine qui justifie la discrimination ou la discrimination qui oriente les choix doctrinaux ? Un peu des deux, sans doute, et on voit bien que les critères humains influencent des doctrines qui devraient en être indépendantes par essence. Tu comprends que même si je trouve ces thèses gnostiques audacieuses et intéressantes (et j’ai bien failli y adhérer dans mes périodes d’agnosticisme, quoi qu’il soit bigrement paradoxal d’être un agnostique gnostique !), je sois très réticent à leur accorder du crédit, au vu de l’histoire contemporaine. Je sais très bien quel argument tu vas m’objecter : la Gnose ne se limite pas à cela ; c’est exact, et chacun peut trouver ce qu’il veut au grand marché des gnosticismes (païens et chrétiens), de Mani aux Cathares, de Marcion aux Mandéens et à l’Église Gnostique Apostolique. L’ennui avec les théories quelles qu’elles soient, c’est que tant que les faits ne démontrent pas de manière scientifiquement irréfutable leur véracité, elles nous font entrevoir un monde virtuel dont la probabilité qu’il coïncide avec le monde réel est pourtant bien faible. Pour conclure, je maintiens ne t’en déplaise qu’il est aujourd’hui d’une facilité déconcertante de « détricoter » le Pari de Pascal, qui, tout cartésien qu’il était, ne pouvait fonder sa réflexion que sur les connaissances de son époque, lesquelles, devenues pour un grand nombre obsolètes, devront être désormais sérieusement revues à l’aune des progrès passés, présents et à venir des sciences exactes et humaines. Ce qui n’enlève rien au mérite de Pascal qui, en son temps, a su mieux que quiconque tirer le maximum de profit du matériel intellectuel à sa disposition. Notons au passage et pour terminer ce long (trop long, j’en suis conscient !) laïus que tout ceci n’empêche nullement que Pascal pourrait ne pas s’être trompé… Mais s’il s’avérait un jour qu’il avait vu juste, on sait maintenant que ce serait pour de mauvaises raisons ! Salut et fraternité. | |
| | | Stans Fondateur
Nombre de messages : 16069 Age : 72 Localisation : Bruxelles - Département de la Dyle Langue : français Emploi/loisirs : histoire, politique Date d'inscription : 10/03/2006
| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Dim 26 Avr 2009, 7:03 pm | |
| - Ardennais a écrit:
- Mon cher Stans,
Tu as sans doute lu mon message trop vite, ou bien ne me suis-je pas suffisamment expliqué: il est vrai que je ne voulais pas alourdir davantage un envoi déjà copieux, et garder quelques arguments ou développements par devers moi pour permettre au débat de s'instaurer et mieux étayer mon discours après coup. Laisse-moi te dire amicalement que tu déformes mes propos et que tu ne démontres absolument pas la fausseté de mes assertions. Ce que tu présentes comme mes présupposés ne sont dans mon texte que des doutes, des hypothèses ou des mises en perspective. En fait je ne cherche pas à "déformer" tes propos : tu me fais là un procès d'intention que je refuse d'accepter. J'ai en fait initié le message relatif au "Pari de Pascal" pour agiter les neurones des éventuels intevenants et, à part toi, il n'y a qu'Alexis, qui a mordu à l'hameçon. Mais je suis personnellement contre les paris qu'ils soient pascaliens ou non. EINSTEIN n'avait-il pas dit un jour que Dieu ne joue pas aux dés ? Je suis, tu le sais, croyant par réflexion personnelle et non point par bigotterie et catholique (gnostique) parce que je suis né dans un univers emprunt de catholicisme. Ailleurs j'aurais pu être souffi, druze, hindou, shintoïste, ... - Citation :
- Ainsi, lorsque tu sembles presque laisser entendre que je pose comme établi que l'âme n'existe pas ; ce n'est pas ce que j'ai écrit! J'ai simplement indiqué que Pascal prenait l'hypothèse inverse, que personne ou presque n'aurait songé à remettre en cause à son époque (à moins de passer pour un inconséquent ou un danger pour la société), pour base de sa réflexion, alors que les avancées des sciences modernes, exactes et humaines, incitent fortement à prendre des distances avec une telle représentation de l'activité psychique.
En fait, et je suis personnellement bien placé pour en parler (mais pas en public), la science ne connais quasi rien sur le cerveau qui fut tour à tour siège du coeur, de l'âme, de la pensée. Pour moi, le cerveau est l'équivalent biologique d'un ordinateur très puissant certes mais qui bugge de temps à autre. Est-il l'intermédiaire entre le corps et l'âme ? Je n'en suis pas absolument certain mais il est évident que lorsque l'on coupe le courant corporel, le cerveau s'éteint comme un ordinateur avant de devenir la proie des asticots. En fait, la question est la suivante : que ce passe-t-il après la déconnexion du cerveau ? Néant, âme abandonnant le corps pour fusionner avec l'esprit, ... ? En fait, il faudrait revenir du Royaume des Morts pour en parler ! - Citation :
- Oui, la notion d'âme a toujours été floue et l'est plus encore aujourd'hui (sauf dans les esprit des fidèles?) et si son inexistence n'est pas prouvée, comme tu l'écris avec justesse, il n'en reste pas moins que les preuves de son existence en tant que telle (c'est à dire une entité constitutive de la personne humaine, radicalement indépendante du corps qui ne serait que son support provisoire) s'amenuisent à chaque nouvelle découverte des sciences cognitives.
A nouveau, le manque de preuves ne signifie pas l'inexistence d'une chose, d'un concept. - Citation :
- De sorte que si l'âme existe, il y a gros à parier sa nature réelle ne soit très éloignée de la définition qu'en donnèrent naguère les religions abrahamiques. Dès lors, la démonstration de Pascal s’en trouve fort compromise.
Toutes les religions ne sont pas abrahamiques et je pense que le concept d'âme ne préoccupait pas tellement les Juifs. Pour eux, ce concept est flou, plus que chez les chrétiens. Par contre, ce concept est très présent dans les religions orientales et je ne me permettrais pas d'affirmer ex cathedra que les hindous, bouddhistes, ... aient tort. - Citation :
- Prenons ton objection suivante, elle aussi très légère. Tu prends un exemple isolé de l'hypothèse qu'il est sensé illustrer, celui des données fournies par les progrès de l’imagerie médicale, pour infirmer la possibilité d'en déduire l'inexistence d'un monde autre que le monde sensible, ce que je n'ai jamais voulu insinuer. De là tu glisses une incise vengeresse sur le fait que la matière est essentiellement constituée de vide (Tiens? Je sens poindre une réminiscence de la doctrine bouddhique ou bien de la Gnose de Princeton? ) pour émettre l'éventualité qu'un autre monde serait ainsi possible. Outre que la déduction est pour le moins forcée, car l’apparente vacuité relative de la matière ainsi observée n’indique en rien la présence éventuelle de quelque chose d’une autre nature, permets-moi de te dire que c'est raisonner à l'envers, car la possibilité d'une réalité ne prouve (ni n'infirme, il est vrai ) la réalité d'une possibilité. Dans l'indécision, la plus élémentaire prudence ainsi que l'honnêteté intellectuelle commandent alors, faute de pouvoir trancher de manière définitive, de préférer, pour une période transitoire de durée indéterminée, l'hypothèse la plus "économique" en présupposés.
Cette assertion n'est pas de la malice de ma part : la science, que tu portes aux nues, démontre de plus en plus que nous ne sommes constitués que de vide ! Tant pis si les gnostiques en avaient l'intuition. Et puis ne dit-on pas de nos jours que le vide possède plus d'énergie, infiniment plus, que la matière sécable ? - Citation :
- En ce qui concerne l'existence du Paradis, de l'Enfer et du Purgatoire, tu ne fais que reprendre ce qu’en disent les religions sans apporter à aucun moment les connaissances factuelles qui nous autoriseraient à l’accepter pour donnée raisonnable. Au bout du compte, et à moins de se soumettre à l’argument d’autorité du clergé dont j’ai démontré précédemment le peu de crédibilité qu’il fallait lui accorder (parce qu’usant et abusant de raisonnements tautologiques), on ne peut la considérer que pour ce qu’elle est, c'est-à-dire une construction intellectuelle que chacun a loisir d’estimer séduisante ou non, sans qu’il soit possible de se prononcer plus avant. Que l’on imagine, ou plus encore : que l’on espère que le monde phénoménal ne saurait être la totalité de ce qui existe n’implique absolument pas que cette opinion reflète l’exacte compréhension de ce qu’est l’Univers, et n’autorise pas à l’affirmer, quoi qu'en pensent les guénoniens. Ce serait prendre ses désirs pour la réalité et devoir reconnaître que pour des motifs semblables, les matérialistes pourraient bien avoir raison… De plus, face aux questionnements que l’Homme s’est légitimement posés en contemplant l’Univers depuis la préhistoire, que de théories ont été échafaudées! Du stoïcisme à l’existentialisme, du chamanisme à l’Islam, du tantrisme au taoïsme, du confucianisme au rationalisme, etc. autant de possibilités d’interprétation offertes à notre sagacité, autant de doctrines ayant suscité l’adhésion de milliers de nos semblables ; autant en fait de systèmes partageant des similitudes, mais que des différences, des divergences voire des points de vue inconciliables séparent également ! Cette profusion de théories rend très improbable la possibilité qu’aucune d’entre elle ne soit autre chose qu’une explication parcellaire ou approximative du réel, tant que de nouvelles découvertes ne viennent infirmer cette dernière remarque et permettre un tri, voire valider par des observations incontestables une de ces théories (jusqu’à la prochaine remise en question). Partant, il faut bien considérer les dogmes et autres doctrines pour ce qu’ils sont : des jalons dans l’histoire de la recherche de la Vérité par l’Homme, de précieux outils auxquels il faut se garder de donner une confiance aveugle. Rien d’autre. Élaborer un système de pensée, aussi puissamment charpenté soit-il, en prenant pour base une ou plusieurs hypothèses qu’aucun élément concret et incontestable ne vient étayer revient presque à coup sûr à bâtir un gratte-ciel sur des sables mouvants, et c’est là le « péché originel » de toutes les religions. De là, la nécessité de l’argument d’autorité verrouillé par une institution de nature cléricale, et pourtant si incompatible avec une réelle « conversion du cœur ».
Là je te suis mal : tu as fait une simple allusion aux Paradis, Enfer et Purgatoire - allusion à laquelle j'ai répondu avec la même brièveté que toi - et voilà que tu glisses vers le clergé (quel clergé au fait ?), l'Univers, une foultitude de doctrines, toujours l'attente de nouvelles découvertes (dans un monde où nombre d'intégristes veulent nous faire revenir en arrière), la construction de gratte-ciel sur des sables mouvants, le "péché originel". - Citation :
- Quant à tes digressions sur l’identification du Démiurge avec Yahweh, dieu des Juifs, je ne te suivrai pas sur ce terrain miné ! Cette thèse gnostique, donc hétérodoxe du point de vue de l’église officielle, est certes très intéressante car elle permet d’expliquer entre autres le rejet de la Franc-maçonnerie par Rome (Car si le Dieu des chrétiens est le créateur de l’Univers, le Grand Architecte des FFMM ne serait-il pas son inspirateur, donc son « supérieur » ?), elle est pour les mêmes raisons à l’origine de l’antijudaïsme qui a imprégné par capillarité l’Église naissante, antijudaïsme grandement responsable de l’antisémitisme des siècles postérieurs. Est-la doctrine qui justifie la discrimination ou la discrimination qui oriente les choix doctrinaux ? Un peu des deux, sans doute, et on voit bien que les critères humains influencent des doctrines qui devraient en être indépendantes par essence. Tu comprends que même si je trouve ces thèses gnostiques audacieuses et intéressantes (et j’ai bien failli y adhérer dans mes périodes d’agnosticisme, quoi qu’il soit bigrement paradoxal d’être un agnostique gnostique !), je sois très réticent à leur accorder du crédit, au vu de l’histoire contemporaine. Je sais très bien quel argument tu vas m’objecter : la Gnose ne se limite pas à cela ; c’est exact, et chacun peut trouver ce qu’il veut au grand marché des gnosticismes (païens et chrétiens), de Mani aux Cathares, de Marcion aux Mandéens et à l’Église Gnostique Apostolique.
Quelles digressions ? Si tu relis très attentivement la Genèse, YHVH est un démiurge imparfait (excuses mon énorme blasphème) car l'Eden n'était pas le seul endroit habité au Monde (c'est la Bible qui l'affirme entre les lignes), YHVH était en concurrence avec Lucifer, le Prince des Lumières et non des Ténèbres, sans qu'on ne sache pourquoi. Il était mâle et femelle comme Adam avant que ce dernier devienne sexué et maître d'Eve (après avoir été l'esclave de Lilith). Quid des Eloïm ? Quid des Anges déchus (que c'est-il passé La Haut ?). Ensuite, notre YHVH apparu il y a 6.000 ans était un D'ieu jaloux, colérique, vengeur, ... Est-ce là l'image du Démiurge absolu ? Je crains fort que non. Quant au Grand Architecte de l'Univers, qu'y puis-je si les maçons se sont tant inspirés de YHVH ? Mais c'est une autre question car le christianisme triomphant règla ses comptes avec le judaïsme bien avant l'arrivée de la franc-maçonnerie (me trompé-je). L'erreur des chrétiens étant évidemment de mettre tous les Juifs dans le même pannier car ce n'est pas le peuple juif que l'on pouvait qualifier, à tort, de déïcide mais bien une poignée de notables juifs qui firent exécuter Jésus par l'occupant romain. Mais j'avais surtout dit que le démiurge chrétien s'apparentait plus à un démiurge absolu que le YHVH empètré entre le Nil et l'Euphrate. Au fait, que penses-tu de YHVH ? Tu peux me répondre en mp si tu veux. Comme tu le dis si bien, la gnose chrétienne ou non est quasi illimitée. - Citation :
- L’ennui avec les théories quelles qu’elles soient, c’est que tant que les faits ne démontrent pas de manière scientifiquement irréfutable leur véracité, elles nous font entrevoir un monde virtuel dont la probabilité qu’il coïncide avec le monde réel est pourtant bien faible.
On peut avoir des intuitions avant qu'elles soient prouvées par les découvertes scientifiques. Et puis la science n'explique pas tout : les principales études de NEWTON étaient tirées de la Bible et non de la pomme qui faillit l'assommer ! - Citation :
- Pour conclure, je maintiens ne t’en déplaise qu’il est aujourd’hui d’une facilité déconcertante de « détricoter » le Pari de Pascal, qui, tout cartésien qu’il était, ne pouvait fonder sa réflexion que sur les connaissances de son époque, lesquelles, devenues pour un grand nombre obsolètes, devront être désormais sérieusement revues à l’aune des progrès passés, présents et à venir des sciences exactes et humaines. Ce qui n’enlève rien au mérite de Pascal qui, en son temps, a su mieux que quiconque tirer le maximum de profit du matériel intellectuel à sa disposition. Notons au passage et pour terminer ce long (trop long, j’en suis conscient !) laïus que tout ceci n’empêche nullement que Pascal pourrait ne pas s’être trompé… Mais s’il s’avérait un jour qu’il avait vu juste, on sait maintenant que ce serait pour de mauvaises raisons !
Nombre de connaissances décrétées obsolètes ne le sont pas toujours : les scientiques rechigneront souvent à avouer que les Anciens avaient raison ; je pense en autre au pouvoir des plantes, au mystère du vaudou et à tant d'autres choses encore. Il faudra encore beaucoup argumenter pour prouver que Pascal avait résolument tort. | |
| | | Ardennais Cofondateur
Nombre de messages : 3518 Age : 58 Localisation : Grasse (Alpes-Maritimes) Langue : français Emploi/loisirs : enseignant Date d'inscription : 20/04/2009
| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Lun 27 Avr 2009, 3:24 pm | |
| Grasse, Octidi 8 Floréal, An CCXVII Mon très cher Stans, Pour commencer, je te prie de bien vouloir m’excuser si j’ai semblé vouloir t’offenser en écrivant que tu avais déformé mes propos, mais je n’ai jamais sous-entendu : intentionnellement ! De sorte que c’est toi qui me fais un procès d’intention en laissant croire que je te fais un procès d’intention… Plus sérieusement, je te remercie d’avoir initié ce débat. C’est une démarche que l’on rencontre trop rarement et comme toi, je regrette le peu d’intérêt qu’elle suscite. Quand tu cites Einstein en relation avec notre sujet, j’ai peur qu’il n’y ait pas de lien direct. Le grand Albert (Tiens ? Quel curieux télescopage avec l’alchimie !) évoquait la notion de hasard. Mais j’ai peut-être mal saisi le cheminement de ta pensée. Au sujet de la connexion corps/esprit (ou âme, comme il te plaira) je n’ai pas plus de certitude absolue que toi. Je pense simplement que l’hypothèse la plus probable (mais pas obligatoirement la plus plaisante) est la plus simple : la conscience qu’a l’Homme de posséder une âme indépendante de la matière n’est sans doute qu’un artéfact du à l’incroyable complexité du cerveau, complexité telle qu’il ne saurait se résoudre à considérer son esprit uniquement comme la résultante de milliards de milliards de processus neurochimiques et électriques sous sa calotte crânienne. Trop trivial pour être vrai… et pourtant, c’est sans doute la vérité, mais c’est pour beaucoup trop difficile à encaisser. Imaginer que l’âme est une entité de l’individu réunie provisoirement au corps mais par nature indépendante et éternelle (mais dans ce cas, on ne peut plus parler d’individu au sens étymologique) peut paraître plus poétique et plus « humaine », mais elle a l’inconvénient majeur de soulever une inextinguible cohorte d’interrogations (existe-t-il un « stock » d’âmes créées depuis l’origine du monde ? Les âmes sont-elles créées au fur et à mesure des naissances ? Que devient l’âme une fois l’enveloppe charnelle disparue ? Quelles en sont les limites, les qualités ? Les animaux en possèdent-ils une, au même titre que les humains? Qu’en est-il de la transmigration des âmes ? De la métempsychose ? Etc. etc.) dont l’hypothèse contraire permet de faire l’économie. Mais accepter que l’esprit (ou la conscience, ou l’âme) puisse s’éteindre en même temps que le corps est trop angoissant pour la majorité d’entre nous. Il faut alors s’inventer l’espoir d’une survie posthume, et c’est la raison d’être principale des religions. Mais je dois te donner raison d’écrire que faute de preuve concluante, l’incertitude est de mise en la matière. Ensuite, tu dis que le manque de preuves ne signifie pas l'inexistence d'une chose, d'un concept. J’en conviens ! Mais il n’en signifie pas davantage la certitude de leur existence, ni de l’existence de tout autre chose qui pourrait nous venir à l’esprit. Et en l’absence d’une nécessité reconnue de l’existence de cette chose, je pense que le plus raisonnable est d’opter pour l’hypothèse de son inexistence. Concernant les religions, je n’ai retenu que les trois grandes confessions monothéistes parce que Pascal évoluait en milieu judéo-chrétien et je n’oublie pas, bien entendu, que l’histoire spirituelle de l’humanité ne se limite pas à elles, loin de là. Je pense simplement ne pas me tromper de beaucoup en imaginant que Pascal ignorait tout du shintoïsme, du jaïnisme, de l’animisme et autres croyances « exotiques » qui offrent des visions du monde très différentes. Par ailleurs le judaïsme rabbinique, né du même milieu en pleine effervescence spirituelle que le christianisme, ne s’est pas désintéressé de l’âme ainsi que tu sembles le penser. Il a même tenté d’en théoriser la composition. Et si les hindouistes (pour ne parler que d’eux) postulent également l’existence d’une âme, ça ne constitue en rien un indice supplémentaire de sa réalité. Les orientaux pourraient très bien avoir eu la même intuition que les occidentaux, sans que celle-ci ne prouve autre chose qu’une similitude des caractéristiques cognitives des uns et des autres, c'est-à-dire en fait l’unité foncière de l’espèce humaine quelles que soient les ethnies et les époques. Mêmes impressions, mêmes possibilités d’erreurs. Tu insinues par la suite que je porte la science aux nues : rien n’est plus faux ! Je ne lui donne pas aveuglément ma confiance entière car je sais pertinemment qu’elle peut momentanément se fourvoyer. Mais je pense que sur le long terme, elle seule fournit des informations fiables, car prédictibles, vérifiables à loisir par la méthode expérimentale : malgré ce qu’en disent à l'envi ses contempteurs, la science est par nature modeste car elle a la sagesse de passer ses supputations au crible de la réalité tangible. Contrairement aux religions, qui émettent des hypothèses souvent immotivées et les prennent pour socle de leur édifice conceptuel sans prendre la plus élémentaire précaution de les valider à aucun moment au moyen d’une méthode agréée par tous. La science s’appuie sur des certitudes pour progresser et élimine au fur et à mesure les hypothèses invalidées, alors que les religions avancent de préjugés en conjectures sans jamais rien démontrer (Avancer n’est pas le terme exact : sachant la faiblesse de leur argumentation, les religions en verrouillent l’interprétation en cristallisant un dogme ne varietur et en secrétant une caste sacerdotale ou ce qui en tient lieu). C’est pourquoi j’accorde plus volontiers ma confiance à la première qu’aux secondes. Mais je sais bien que chaque nouveau progrès des connaissances scientifiques ne fait que soulever de nouvelles interrogations en cascade, ce qui offre à la masse des croyants l’argument fallacieux de devoir recourir aux dogmes de leurs églises respectives pour combler le « vide » ! Ce qui semble être alors un triomphe aux yeux des individus viscéralement attachés à leurs convictions n’est en fait qu’une victoire à la Pyrrhus : un aveu d’ignorance relative de la science n’autorisera jamais à compléter un corpus de connaissances établies méthodiquement (par un processus intellectuel vérifiable par chacun), patiemment (par au moins deux millénaires de recherches et tâtonnements), collectivement (des générations entières réparties sur les deux hémisphères) et reconnues universellement (les découvertes validées sont reconnues et partagées par tous) par une assertion à priori sans fondement unanimement reconnu (sinon elle ne ferait pas débat depuis des siècles), datée (chaque affirmation dogmatique, figée par nature, correspond à une époque précise de l’histoire des civilisations), partiale (car édictée par un prophète unique, son ou ses disciples ou une classe sociale numériquement restreinte) et particulière (aucune confession n’a jamais atteint l’universalité, bien qu’elles la convoitent toutes ardemment : la « Vérité » de chaque groupe n’est jamais pleinement identique à celle des autres). Autant de motifs qui me fournissent un doute plus que raisonnable quant au désintéressement et à la sincérité des religions qui souhaitent suppléer aux faiblesses supposées de la démarche scientifique par l’acceptation de leurs vues finalement très peu convaincantes puisque rien de concret et irréfutable n’est jamais venu les étayer. Remplacer le doute par la certitude mal fondée ne conduit pas au savoir. Mais c’est une constante chez les croyants de vouloir coûte que coûte faire coïncider la réalité et ce qu’ils en conçoivent, au mépris de la prudence intellectuelle la plus basique, et quitte à renier les principes moraux de leur propre confession si cela permet de mieux asseoir son emprise sur les esprits. Concernant l’intuition, mon cher Stans, je suis d’accord avec toi lorsque tu dis qu’elle permet d’imaginer des possibles et qu’elle contribue parfois à faire avancer la connaissance. Mais si cette intuition n’est pas relayée par une méthode d’expertise de type expérimental, elle reste au stade d’intuition ! Or il ne suffit pas qu’une intuition donnée parmi tant d’autres se révèle par la suite juste pour qu’elles le soient toutes ! C’est là, à mon humble avis, que ce situe le fossé infranchissable entre les démarches scientifique et religieuse : le scientifique cherche à valider le bien-fondé de son intuition pour s’en émanciper, le religieux en est l’esclave et l’érige en certitude sans que rien l’y autorise (ce qui est innocent et sans conséquence fâcheuse à titre personnel, mais devient malhonnête et irresponsable quand il impose ses convictions aux autres). Tu écris également que la science n’explique pas tout, et tu sais que j’ai déjà pleinement souscrit à cette idée. Mais tu t’empresses d’ajouter que les études de Newton concernaient principalement la Bible et non le principe de la gravité ou autre. Outre que c’est partiellement erroné, je ne vois pas ce que tu veux démontrer par là. Que je sache, Newton est passé à la postérité pour sa théorie de la gravitation universelle et non pour ses qualités d’exégète. Il s’intéressait en effet à des sujets que nous considérons aujourd’hui comme étant « ésotériques » (la qabbalah et l’alchimie) mais qui faisaient partie intégrante des préoccupations intellectuelles et scientifiques des érudits de son époque. Tu avances ensuite l’argument de données rejetées par la science puis finalement acceptées par elles (vertus médicinales des plantes, par exemple). Hormis le fait que ce soit très contestable (j’en veux pour preuve l’élaboration de l’aspirine, par la recherche et l’isolement du principe actif contenu dans l’écorce de saule, remède connu depuis l’antiquité), c’est précisément le grand mérite de la science d’écarter provisoirement les explications que rien ne confirme au moment de leur examen, quitte à les réintégrer ultérieurement quant de nouvelles découvertes viennent les éclairer d’un jour nouveau. Car contrairement à ce que tu avances en dépit des exemples qui te contredisent de manière flagrante, la science reconnaît toujours ses erreurs pour la simple et bonne raison qu’une fois apportées, les preuves sont incontestables. A contrario, ce sont les religions et les superstitions qui ne le font que contraintes et forcées, et encore ! Elles refusent souvent d’admettre l’évidence qui ne leur est point favorable, au prix d’inimaginables contorsions intellectuelles trahissant un embarras certain, sinon de la mauvaise foi. En fait, la science commence déjà à pouvoir expliquer rationnellement des phénomènes telles que l’efficacité de l’acupuncture, les facultés remarquables des grands yogis, les expériences de mort imminentes, le vaudou, etc. Les soi-disant mystères d’aujourd’hui sont les banalités de demain. Cette avancée inexorable chagrine les esprits empêtrés dans le merveilleux, préférant les énigmes à une réalité qu’ils jugent à tort décevante et trop triviale. Quant à YHWH maintenant, lorsque je parlais de digressions, ce n’était pas péjoratif : je ne faisais que constater l’importance que tu semblais apporter à la distinction entre le dieu des anciens Hébreux et le dieu des Chrétiens. Il me semble que cette problématique, honorable en soi, s’écarte sensiblement du sujet. Il y a donc bien digression au sens que le dictionnaire donne à ce mot. D’ailleurs tu reconnais toi-même que tu livres ton avis personnel, et je me permettais juste de te mettre amicalement en garde contre des thèses qui ont par le passé permis de cautionner les pires exactions contre la communauté juive. Mais je t’accorde qu’une lecture attentive de l’Ancien Testament permet de détecter une foule de détails peu conformes aux idées communément admises et qui peuvent facilement troubler l’innocent lecteur… et je te ferai prochainement part en « mp », comme tu le demandes, de quelques remarques iconoclastes sur le sujet. Et je persiste et signe : Pascal peut tout aussi bien avoir raison ou tort sur le fond. Mais au vu des prodigieuses avancées des sciences contemporaines dont il ne pouvait évidemment pas bénéficier à son époque, sa démonstration n’est plus valide ! Elle reste un splendide monument de la pensée humaine, une borne milliaire qui nous sert d’appui et de repère dans notre recherche perpétuelle de la Vérité, mais elle est tout aussi datée et obsolète que le système géocentrique. Salut et Fraternité. | |
| | | Stans Fondateur
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| Sujet: Re: Le Pari de Pascal [topic unique] Lun 27 Avr 2009, 4:48 pm | |
| - Ardennais a écrit:
- Grasse, Octidi 8 Floréal, An CCXVII
Mon très cher Stans,
Pour commencer, je te prie de bien vouloir m’excuser si j’ai semblé vouloir t’offenser en écrivant que tu avais déformé mes propos, mais je n’ai jamais sous-entendu : intentionnellement ! De sorte que c’est toi qui me fais un procès d’intention en laissant croire que je te fais un procès d’intention… Plus sérieusement, je te remercie d’avoir initié ce débat. C’est une démarche que l’on rencontre trop rarement et comme toi, je regrette le peu d’intérêt qu’elle suscite.
Quand tu cites Einstein en relation avec notre sujet, j’ai peur qu’il n’y ait pas de lien direct. Le grand Albert (Tiens ? Quel curieux télescopage avec l’alchimie !) évoquait la notion de hasard. Mais j’ai peut-être mal saisi le cheminement de ta pensée. Au sujet de la connexion corps/esprit (ou âme, comme il te plaira) je n’ai pas plus de certitude absolue que toi. Je pense simplement que l’hypothèse la plus probable (mais pas obligatoirement la plus plaisante) est la plus simple : la conscience qu’a l’Homme de posséder une âme indépendante de la matière n’est sans doute qu’un artéfact du à l’incroyable complexité du cerveau, complexité telle qu’il ne saurait se résoudre à considérer son esprit uniquement comme la résultante de milliards de milliards de processus neurochimiques et électriques sous sa calotte crânienne. Trop trivial pour être vrai… et pourtant, c’est sans doute la vérité, mais c’est pour beaucoup trop difficile à encaisser. Imaginer que l’âme est une entité de l’individu réunie provisoirement au corps mais par nature indépendante et éternelle (mais dans ce cas, on ne peut plus parler d’individu au sens étymologique) peut paraître plus poétique et plus « humaine », mais elle a l’inconvénient majeur de soulever une inextinguible cohorte d’interrogations (existe-t-il un « stock » d’âmes créées depuis l’origine du monde ? Les âmes sont-elles créées au fur et à mesure des naissances ? Que devient l’âme une fois l’enveloppe charnelle disparue ? Quelles en sont les limites, les qualités ? Les animaux en possèdent-ils une, au même titre que les humains? Qu’en est-il de la transmigration des âmes ? De la métempsychose ? Etc. etc.) dont l’hypothèse contraire permet de faire l’économie. Mais accepter que l’esprit (ou la conscience, ou l’âme) puisse s’éteindre en même temps que le corps est trop angoissant pour la majorité d’entre nous. Il faut alors s’inventer l’espoir d’une survie posthume, et c’est la raison d’être principale des religions. Mais je dois te donner raison d’écrire que faute de preuve concluante, l’incertitude est de mise en la matière. Bonjour l'ami ! J'ai simplement fait un parallèle entre Einstein et Pascal au sujet du hasard. Comme toi je n'aime pas trop le Pari de Pascal mais pour une autre raison : on croit ou on ne croit pas en Dieu ; on aime ou on aime pas Son Créateur mais on n'en fait pas l'objet d'un pari. Quant à l'existence des âmes, la religion juive parle de la Gouve qui est un réservoir inépuisable d'âmes destiné aux embryons et les religions orientales les font entrer dans des cycles de réincarnation. Les religions monothéistes n'ont donc pas l'apanage de la description de l'âme qui, selon certains, existe pour tous les êtres vivants. Le cerveau est certes complexe selon toi mais ce n'est quune masse graisseuse pour moi destinée à pourrir avec le reste de notre enveloppe charnelle (comme un ordinateur voué à la poubelle). - Citation :
- Ensuite, tu dis que le manque de preuves ne signifie pas l'inexistence d'une chose, d'un concept. J’en conviens ! Mais il n’en signifie pas davantage la certitude de leur existence, ni de l’existence de tout autre chose qui pourrait nous venir à l’esprit. Et en l’absence d’une nécessité reconnue de l’existence de cette chose, je pense que le plus raisonnable est d’opter pour l’hypothèse de son inexistence.
Qu'il me soit permis de faire le choix inverse qui sera le "Pari de Stans". - Citation :
- Concernant les religions, je n’ai retenu que les trois grandes confessions monothéistes parce que Pascal évoluait en milieu judéo-chrétien et je n’oublie pas, bien entendu, que l’histoire spirituelle de l’humanité ne se limite pas à elles, loin de là. Je pense simplement ne pas me tromper de beaucoup en imaginant que Pascal ignorait tout du shintoïsme, du jaïnisme, de l’animisme et autres croyances « exotiques » qui offrent des visions du monde très différentes. Par ailleurs le judaïsme rabbinique, né du même milieu en pleine effervescence spirituelle que le christianisme, ne s’est pas désintéressé de l’âme ainsi que tu sembles le penser. Il a même tenté d’en théoriser la composition. Et si les hindouistes (pour ne parler que d’eux) postulent également l’existence d’une âme, ça ne constitue en rien un indice supplémentaire de sa réalité. Les orientaux pourraient très bien avoir eu la même intuition que les occidentaux, sans que celle-ci ne prouve autre chose qu’une similitude des caractéristiques cognitives des uns et des autres, c'est-à-dire en fait l’unité foncière de l’espèce humaine quelles que soient les ethnies et les époques. Mêmes impressions, mêmes possibilités d’erreurs.
C'est tout de même intrigant que toutes les religions aient édifié le même concept d'âme à peu de chose près. - Citation :
- Tu insinues par la suite que je porte la science aux nues : rien n’est plus faux ! Je ne lui donne pas aveuglément ma confiance entière car je sais pertinemment qu’elle peut momentanément se fourvoyer. Mais je pense que sur le long terme, elle seule fournit des informations fiables, car prédictibles, vérifiables à loisir par la méthode expérimentale : malgré ce qu’en disent à l'envi ses contempteurs, la science est par nature modeste car elle a la sagesse de passer ses supputations au crible de la réalité tangible. Contrairement aux religions, qui émettent des hypothèses souvent immotivées et les prennent pour socle de leur édifice conceptuel sans prendre la plus élémentaire précaution de les valider à aucun moment au moyen d’une méthode agréée par tous.
C'est tout de même un religieux belge qui a imaginé le concept du Big Bang ! Comme quoi une éducation religieuse n'est pas incompatible avec la science (sauf pour les Talibans). - Citation :
- La science s’appuie sur des certitudes pour progresser et élimine au fur et à mesure les hypothèses invalidées, alors que les religions avancent de préjugés en conjectures sans jamais rien démontrer (Avancer n’est pas le terme exact : sachant la faiblesse de leur argumentation, les religions en verrouillent l’interprétation en cristallisant un dogme ne varietur et en secrétant une caste sacerdotale ou ce qui en tient lieu). C’est pourquoi j’accorde plus volontiers ma confiance à la première qu’aux secondes. Mais je sais bien que chaque nouveau progrès des connaissances scientifiques ne fait que soulever de nouvelles interrogations en cascade, ce qui offre à la masse des croyants l’argument fallacieux de devoir recourir aux dogmes de leurs églises respectives pour combler le « vide » ! Ce qui semble être alors un triomphe aux yeux des individus viscéralement attachés à leurs convictions n’est en fait qu’une victoire à la Pyrrhus : un aveu d’ignorance relative de la science n’autorisera jamais à compléter un corpus de connaissances établies méthodiquement (par un processus intellectuel vérifiable par chacun), patiemment (par au moins deux millénaires de recherches et tâtonnements), collectivement (des générations entières réparties sur les deux hémisphères) et reconnues universellement (les découvertes validées sont reconnues et partagées par tous) par une assertion à priori sans fondement unanimement reconnu (sinon elle ne ferait pas débat depuis des siècles), datée (chaque affirmation dogmatique, figée par nature, correspond à une époque précise de l’histoire des civilisations), partiale (car édictée par un prophète unique, son ou ses disciples ou une classe sociale numériquement restreinte) et particulière (aucune confession n’a jamais atteint l’universalité, bien qu’elles la convoitent toutes ardemment : la « Vérité » de chaque groupe n’est jamais pleinement identique à celle des autres). Autant de motifs qui me fournissent un doute plus que raisonnable quant au désintéressement et à la sincérité des religions qui souhaitent suppléer aux faiblesses supposées de la démarche scientifique par l’acceptation de leurs vues finalement très peu convaincantes puisque rien de concret et irréfutable n’est jamais venu les étayer. Remplacer le doute par la certitude mal fondée ne conduit pas au savoir. Mais c’est une constante chez les croyants de vouloir coûte que coûte faire coïncider la réalité et ce qu’ils en conçoivent, au mépris de la prudence intellectuelle la plus basique, et quitte à renier les principes moraux de leur propre confession si cela permet de mieux asseoir son emprise sur les esprits.
Je me suis souvent demandé si le dogme n'est pas imposé provisoirement par le clergé tant que les fidèles soient en mesure de le comprendre. N'as-tu jamais été embarrassé par des questions difficiles de tes enfants ? - Citation :
- Concernant l’intuition, mon cher Stans, je suis d’accord avec toi lorsque tu dis qu’elle permet d’imaginer des possibles et qu’elle contribue parfois à faire avancer la connaissance. Mais si cette intuition n’est pas relayée par une méthode d’expertise de type expérimental, elle reste au stade d’intuition ! Or il ne suffit pas qu’une intuition donnée parmi tant d’autres se révèle par la suite juste pour qu’elles le soient toutes ! C’est là, à mon humble avis, que ce situe le fossé infranchissable entre les démarches scientifique et religieuse : le scientifique cherche à valider le bien-fondé de son intuition pour s’en émanciper, le religieux en est l’esclave et l’érige en certitude sans que rien l’y autorise (ce qui est innocent et sans conséquence fâcheuse à titre personnel, mais devient malhonnête et irresponsable quand il impose ses convictions aux autres).
Je ne me souviens plus des noms, mais nombre de savants avaient eu l'intuition de leur découverte. L'intuition peut donc précéder la science. - Citation :
- Tu écris également que la science n’explique pas tout, et tu sais que j’ai déjà pleinement souscrit à cette idée. Mais tu t’empresses d’ajouter que les études de Newton concernaient principalement la Bible et non le principe de la gravité ou autre. Outre que c’est partiellement erroné, je ne vois pas ce que tu veux démontrer par là. Que je sache, Newton est passé à la postérité pour sa théorie de la gravitation universelle et non pour ses qualités d’exégète. Il s’intéressait en effet à des sujets que nous considérons aujourd’hui comme étant « ésotériques » (la qabbalah et l’alchimie) mais qui faisaient partie intégrante des préoccupations intellectuelles et scientifiques des érudits de son époque.
Mais de là à consacrer 90% de son temps à l'apprentissage de l'hébreux, de la kabale, de l'alchimie, ... - Citation :
- Tu avances ensuite l’argument de données rejetées par la science puis finalement acceptées par elles (vertus médicinales des plantes, par exemple). Hormis le fait que ce soit très contestable (j’en veux pour preuve l’élaboration de l’aspirine, par la recherche et l’isolement du principe actif contenu dans l’écorce de saule, remède connu depuis l’antiquité), c’est précisément le grand mérite de la science d’écarter provisoirement les explications que rien ne confirme au moment de leur examen, quitte à les réintégrer ultérieurement quant de nouvelles découvertes viennent les éclairer d’un jour nouveau. Car contrairement à ce que tu avances en dépit des exemples qui te contredisent de manière flagrante, la science reconnaît toujours ses erreurs pour la simple et bonne raison qu’une fois apportées, les preuves sont incontestables.
C'est généralement vrai mais nombre de "savants" ont du mal à admettre leurs erreurs et s'obstinent alors à vouloir faire entrer leurs théories dans le moule ! Et puis il y a toujours ce mépris envers l'inconnu scientifique (les guérisseurs, les chamanes, les plantes, ...). - Citation :
- A contrario, ce sont les religions et les superstitions qui ne le font que contraintes et forcées, et encore ! Elles refusent souvent d’admettre l’évidence qui ne leur est point favorable, au prix d’inimaginables contorsions intellectuelles trahissant un embarras certain, sinon de la mauvaise foi. En fait, la science commence déjà à pouvoir expliquer rationnellement des phénomènes telles que l’efficacité de l’acupuncture, les facultés remarquables des grands yogis, les expériences de mort imminentes, le vaudou, etc. Les soi-disant mystères d’aujourd’hui sont les banalités de demain. Cette avancée inexorable chagrine les esprits empêtrés dans le merveilleux, préférant les énigmes à une réalité qu’ils jugent à tort décevante et trop triviale.
Le responsable de l'observatoire du Vatican a admis l'année dernière qu'il pouvait avoir des vies plus évoluées que la notre et plus proches de Dieu ailleurs dans l'Univers. J'attends toujours une telle "révélation" de la part de nombre d'autres religions. - Citation :
- Quant à YHWH maintenant, lorsque je parlais de digressions, ce n’était pas péjoratif : je ne faisais que constater l’importance que tu semblais apporter à la distinction entre le dieu des anciens Hébreux et le dieu des Chrétiens. Il me semble que cette problématique, honorable en soi, s’écarte sensiblement du sujet. Il y a donc bien digression au sens que le dictionnaire donne à ce mot. D’ailleurs tu reconnais toi-même que tu livres ton avis personnel, et je me permettais juste de te mettre amicalement en garde contre des thèses qui ont par le passé permis de cautionner les pires exactions contre la communauté juive. Mais je t’accorde qu’une lecture attentive de l’Ancien Testament permet de détecter une foule de détails peu conformes aux idées communément admises et qui peuvent facilement troubler l’innocent lecteur… et je te ferai prochainement part en « mp », comme tu le demandes, de quelques remarques iconoclastes sur le sujet.
J'attends tes remarques iconoclastes avec impatience car si j'affirme que YHVH n'est pas LE démiurge, je ne dis pas pour autant que les Juifs doivent être persécutés. On pourrait tenir le même raisonnement pour Allah. - Citation :
- Et je persiste et signe : Pascal peut tout aussi bien avoir raison ou tort sur le fond. Mais au vu des prodigieuses avancées des sciences contemporaines dont il ne pouvait évidemment pas bénéficier à son époque, sa démonstration n’est plus valide ! Elle reste un splendide monument de la pensée humaine, une borne milliaire qui nous sert d’appui et de repère dans notre recherche perpétuelle de la Vérité, mais elle est tout aussi datée et obsolète que le système géocentrique.
Salut et Fraternité. Je t'ai dit plus haut que parier sur Dieu constitue à mes yeux un blasphème ! | |
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