Attila et le Pape Leon Ier le Grand

Sujet: Attila et le Pape Leon Ier le Grand Ven 14 Avr 2006, 2:58 pm

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Citation :: Vers 452, Attila, le roi des Huns qui vient de prendre une tatouille en Gaule, reconstitue lentement ses forces et décide de se payer une petite cure thermale du côté de l’Italie, histoire de se refaire une santé.
Comme il aime la compagnie, il y entraîne tous ses guerriers.
Respectueux des traditions, ceux-ci dévastent Milan, Pavie puis Aquilée ou Aquileia, si vous préférez. Là, quelques malveillants leur suggèrent d’aller se reposer et d’admirer les couchers de soleil dans cet endroit idyllique que sont les îles du côté de Torcello.
Les gens de l’endroit, qui n’ont pas encore fini d’emménager, se poussent un peu sur les autres îlots pour faire de la place aux nouveaux venus, hospitalité oblige.
C'est vrai qu'il s’y trouve bien Attila. Il fait même tailler un trône dans la pierre, car il a l’intention de s’établir. La seule chose qui le chagrine, c’est cette chaleur moite dans laquelle il baigne. Pas l’habitude ! Les steppes d’Asie, c’est chaud parfois, mais le plus souvent c’est venteux et froid, voir franchement glacial. C’est d’ailleurs pour cela qu’il voyage tant.
Alors voilà nos Huns, enlevant couche après couche jusqu’à se retrouver presque nus car ce n’est qu’alors qu’ils peuvent sentir glisser sur leur peau, la douce caresse de la brise lagunaire.
La première réaction des moustiques est dubitative. Qu’est-ce que ces peaux jaunâtres ? Ne cachent-elles pas sous ce teint, quelques problèmes hépatiques ou autres affections qui risquent de nous rendre malades ?
Et comme la communauté des diptères n’a rien à envier à celle des humains quant à la veulerie de ses mœurs, ils choisissent le, ou plutôt la plus faible d’entre eux, et lui ordonnent de goûter.
Pendant une longue semaine, la désignée volontaire s’exécute, butinant par-ci, piquant par-là et ne paraît nullement incommodée. Bien mieux, elle semble reprendre force et embonpoint laissant présager une ponte fertile et ne daigne même plus tourmenter le moindre insulaire.
Lorsque les congénères du cobaye - je vous parle toujours du moustique pas de l'animal de compagnie - eurent goûté à leur tour, ce fut la curée.
Ces chairs tendres comme la peau des bébés, en plus odorant certes mais pas tannées par le soleil comme l’est le cuir des autochtones, et qui s’offraient dénudées à leurs trompes assoiffées !
La chose s’ébruita d’îles en îlots et de lagune en plaine tant et si bien que Torcello fut envahie par une nuée d’insectes suceurs de sang.
Ça non plus, ils ne connaissaient pas, nos Huns. Dans les steppes, pas de bourdonnements qui vous harcèlent toutes les nuits. Pas de pustules rougeâtres qui vous filent des démangeaisons intenables. Ils se demandaient donc quel sort néfaste prenait un malin plaisir à s’acharner sur eux.

- Y’en a marre ! - crie Attila. - On descend vers Rome pour voir si c’est pas mieux par-là !
- Ouais ! - crient ses Huns, et même les autres dans un ensemble touchant.
Les premiers, les Huns, valeureux guerriers, eurent admis périr sous les coups d’adversaires tenaces mais pas exsangues, pompés par de minuscules bestioles qui ne leur laissaient aucun repos.
Les autres, les Venètes (en français dans le texte) préférant les moustiques aux mongoles d’Attila.
C’est ainsi que pour le bonheur des autres, les Huns quittèrent la future Vénétie, tête basse, vaincus par un ennemi mille fois plus petit qu’eux et que les gens du cru appelaient du nom étrange de Zanzare.

À ce point de l’histoire, il nous faut constater plusieurs choses.
Premièrement : il y a bien longtemps qu’on ne parle plus des Euganei. Tant mieux pour les Veneti (en italien dans le texte, cette fois) et tant pis pour les premiers nommés ! Ils vont disparaître dans les oubliettes de l’Histoire.
Deuxièmement : jamais l’Histoire, par la plume des historiens, n’a mentionné les moustiques et pourtant sans ces insectes minuscules, il n’y aurait peut-être jamais eu de Venise.
Injuste pour ces diptères ? Ils s’en moquent probablement car de toutes les manières, quoi que nous fassions, ils savent qu’ils nous survivront. Libres à eux alors de se conter notre histoire à leur façon.
Troisièmement : c’est une règle bien établie maintenant, les barbares sont toujours poussés dans le dos par plus barbares qu’eux.

Mais qu’est devenu Attila ? Pour l’anecdote, mais alors vraiment pour l’anecdote car cela non plus ne figure dans aucun livre d’histoire et n’intéresse nullement celle qu’on appellera plus tard la Sérénissime, Attila est bien arrivé à Rome. C’est pas compliqué car depuis toujours, et c’est bien connu, tous les chemins y mènent.
Dans ses bagages, bon nombre de moustiques se sont glissés, préférant une bonne gastronomie à une mauvaise territorialité, et tout le long de la route, ils ont harcelé des guerriers fourbus par tant et tant de nuits sans sommeil.
Attila, ayant entendu parlé d’un rebouteux capable de faire des miracles, se rendit directement chez lui.
Le pape Léon Ier reçut donc cet hôte encombrant tout en se demandant ce que le Très Haut lui réservait comme surprise.
- Il paraît que tu es un très grand sorcier ! Le représentant sur terre d’un Dieu que personne n’a jamais vu ! Alors tu vas pouvoir faire quelque chose pour moi et mes hommes. T’as qu’à me donner le prix de tes services. J’organise deux trois razzias et on n’en parle plus.

Le pape, roublard comme dix popes, sent qu’il y a là matière à gagner en prestige. Il demande :
- Expose-moi ton problème, mon fils.
- C’est tout simple ! Depuis que nous sommes en vacances dans vos contrées, mes hommes et moi avons des bourdonnements d’oreilles toutes les nuits, au point de ne pouvoir fermer l’œil. Et au matin, nous sommes remplis de pustules qui nous occasionnent d’affreuses démangeaisons. Impossible de tenir correctement un glaive, une lance ou une hache ! Comment veux-tu guerroyer dans de telles conditions ? - qu’il répond Attila, doutant pourtant de la filiation annoncée.
- Le plus simple, mon fils, serait de te faire baptiser et de réciter le Credo chaque matin ainsi que trois Pater et quatre Ave avant chaque repas.
- Et sans toutes ces simagrées ?…
- C’est plus cher, forcément ! - répond Léon le premier du nom, mais pas le premier venu.

Ils se mettent donc d’accord, contre la moitié des rapines réalisées par le Hun, l'autre allait oublier Credo, Pater et autres Ave.
- Voilà, mon fils, une véritable potion magique. Tu devras t’en mettre sur la figure tous les soirs, cela fera disparaître les bourdonnements. Rassure-toi cela ne sent pas mauvais. Pour les pustules, ta peau est bien trop sensible pour ne pas réagir à l’air pollué de nos régions. Il te faudra donc rester couvert de la tête aux pieds, jour et nuit. Au bout de quelques temps, les démangeaisons disparaîtront d’elles même. Je te conseille donc, pour ta santé bien entendu, de retrouver prestement tes pénates.

C’est ce que les historiens de tous poils nomment si pudiquement : « les négociations entre Léon Ier et Attila. »

Ainsi donc, Attila rentra chez lui après avoir payé à prix d’or… une fiole d’essence de citronnelle et en se demandant par quel prodige ce rebouteux, de si bons conseils, aurait pu être son géniteur.
Comme quoi, on peut être grand chef de guerre mais mauvais stratège commercial et ne rien entendre à la religiosité des propos de son interlocuteur.

Sujet: Re: Attila et le Pape Leon Ier le Grand Ven 14 Avr 2006, 7:07 pm

Où diable as-tu été cherché cela Alexis ? canabis

Sujet: Re: Attila et le Pape Leon Ier le Grand Ven 14 Avr 2006, 9:42 pm

Sur le site qui raconte l'histoire de Venise avec humour. ;)

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