L'Évangile de Thomas

Grasse, Décadi, 20 floréal CCXXI.

Cher Stans,

Merveilleux Évangile de Thomas... mais ô combien mystérieux!

Logion 13: "

Citation :

Jésus dit à ses disciples : « Comparez-moi et dites-moi à quoi je ressemble. » Simon-Pierre lui dit : « Tu ressembles à un ange juste. » Matthieu lui dit : « Tu ressembles à un philosophe qui a du cœur. » Thomas lui dit : « Maître, ma bouche ne me permet pas de dire à qui tu ressembles. » Jésus lui répondit : « Je ne suis pas ton Maître, car tu t’es enivré à la source vive que j’ai moi-même mesurée. Il le prit à part et lui dit trois mots. Quand Thomas revint vers ses amis, ils lui demandèrent ce que Jésus lui avait dit. Thomas leur répondit : « Si je vous révélais une des paroles qu’il m’a confiées, vous prendriez des pierres et me les lanceriez ; le feu sortirait de ces pierres et vous consumerait. »

"

Didyme Jude Thomas, ayant réalisé l'identité de Jésus avec l'Un, innommable et ineffable, n'est plus le disciple puisque le Christ dit ne plus être son maître. Est-ce à dire que Jésus considère désormais Thomas comme son égal en Connaissance? Est-ce là l'origine de son mystérieux surnom qui signifie "jumeau"? Pourquoi Jésus le prend-il à part, alors que "la lumière ne saurait être mise sous le boisseau"? Quelles sont les trois mots si redoutables, si scandaleux, que Jésus n'a semble-t-il révélés qu'à lui? Si l’épisode décrit par ce logion de l'Évangile de Thomas est véridique, pourquoi la tradition du christianisme officiel fait-elle de Thomas le parangon de l'incrédulité? Mais si cet épisode est totalement sorti de l'imagination des rédacteurs de cet apocryphe, pour quelle étrange raison ceux-ci auraient-ils choisi une narration aussi scandaleusement hérétique, prêtant le flanc à la critique de manière aussi masochiste?

Salut et Fraternité

Voudrais-tu dire par là mon cher Ardennais que Thomas serait le seul véritable disciple de Jésus ?

Grasse, Primidi, 21 floréal CCXXI.

Cher Stans,

Citation :

Voudrais-tu dire par là mon cher Ardennais que Thomas serait le seul véritable disciple de Jésus ?

Non, pas du tout! Mais effectivement, certains disciples semblent avoir reçu un enseignement particulier, à en croire certains apocryphes... Thomas, Marie de Magdala, Philippe, et même Judas. En bon pédagogue, Jésus devait certainement adapter son enseignement aux capacités ou à la personnalité de celui ou de celle qui le recevait. Au delà de la foule venue l'écouter, un premier cercle de soixante-douze (premier en nombre, mais vraisemblablement pas le premier constitué), puis son "cercle intérieur" et historique des douze... et peut-être enfin parmi ces douze, quelques intimes privilégiés, car plus doués? Ce qui est frappant, c'est que 12 et 72 sont des nombres liés au symbolisme astronomique... Ce qui ouvre d'autres pistes de réflexion...

Salut et Fraternité!

D'où l'utilité de connaître tous les évangiles qui détiendraient chacun une parcelle de l'enseignement de Jésus...

Grasse, Duodi, 22 floréal CCXXI.

Cher Stans,

Stans a écrit:

D'où l'utilité de connaître tous les évangiles qui détiendraient chacun une parcelle de l'enseignement de Jésus...

Oui, sans aucun doute. Mais aussi d'étudier l'histoire, l'exégèse, les langues anciennes, etc. Car ces textes ont subi bien des traductions, adaptations voire manipulations, et bien malin qui peut dire quelle était la teneur des originaux.

Un exemple parmi d'autres: aussi bien les apocryphes que les canoniques précisent que Jésus a eu des frères (et des soeurs, d'ailleurs). Pour un catholique du XXIème siècle héritier de plusieurs siècles de tradition chrétienne, Jésus est obligatoirement enfant unique et l'est obligatoirement resté. Pour contourner la difficulté, on nous dit alors que le terme sémitique utilisé pour dire "frère" signifiait également "cousin" ou "parent proche". Ce qui est exact. Mais pour le traduire, le texte grec d'origine utilise "adelphos" qui signifie exclusivement "frère" et non "anepsios" signifiant "cousin". Les frères de Jésus étaient donc bel et bien ses frères biologiques. Gênés par cette évidence, les dogmatiques avancent alors que ces frères seraient des demi-frères, enfants d'un premier mariage de Joseph. La virginité de marie serait donc respectée... ouf! Trop vite dit: aucun chrétien ne contestera le fait que Joseph est monté au Temple de Jérusalem pour y présenter l'enfant Jésus peu après sa naissance... Or, la tradition était d'y présenter son premier-né.

Résultat: on peut retourner les faits dans tous les sens, la thèse de Jésus enfant unique du couple Marie-Joseph ne tient pas la route. À moins de supposer que les textes se trompent sur un des points évoqués ci-dessus. L'infaillibilité supposée des textes se retourne contre ceux qui voulaient l'utiliser pour asseoir leur lecture partisane.

Salut et Fraternité !