275è anniversaire de la F.: M.: française : transparence ?

Source : http://www.temoignagechretien.fr/journal/ar_article.php?num=3064&categ=Croire

Franc-maçonnerie. Loges entrouvertes mais encore poussiéreuses

par Emmanuelle Debelleix

Citation :

Pour son 275e anniversaire, la franc-maçonnerie française déclare évoluer et être en phase avec la société actuelle. Le discours officiel correspond-il pour autant à une réalité ? Le travail de communication envers le grand public est évident. Rénovation du musée de la rue Cadet à Paris, organisation de visites des temples maçonniques en province… : les maçons veulent se faire voir. La création, en 2002, d’un Institut maçonnique de France rassemblant neuf obédiences, se voulait une réponse à la « nécessité d’arrêter de se regarder en chiens de faïence pour pouvoir enrichir la réflexion », comme le note Jean-Claude Rochignieux, du Grand Orient de France.

Dans le même temps, toutes les grandes obédiences maçonniques se prononcent sur les sujets de société qui préoccupent l’ensemble des Français. Islam, bioéthique, construction européenne… Tels sont aujourd’hui les thèmes majeurs des discussions dans les loges. Cependant, cette volonté de retrouver un nouvel élan n’occulte pas un sentiment de malaise généralisé. La franc-maçonnerie peine dans ses tentatives pour ne plus être assimilée à un vague réseau d’influence. Certes, le Grand Orient a récemment refusé de reconnaître les « fraternelles », ces associations regroupant des frères de la même profession, qui ont été impliquées dans de nombreux scandales politico-judiciaires. Mais il n’a pas pour autant interdit à ses membres d’y adhérer. Quant à l’efficacité de la « justice maçonnique », elle est limitée. En effet, beaucoup des maçons exclus de leurs loges à la suite de scandales se retrouvent aujourd’hui à la Grande Loge nationale de France, une obédience « très affairiste », comme le reconnaissent à demi-mots la plupart des maçons !

Par ailleurs, une plus grande adaptation aux réalités sociales actuelles signifierait certainement une plus grande ouverture sociale de la maçonnerie. Or, c’est loin d’être le cas aujourd’hui. Les loges sont encore des rassemblements de notables. Jean-Claude Rochignieux explique ainsi que, « vu le montant de la capitation exigée par les obédiences, on n’entre en maçonnerie que lorsqu’on a une situation établie ». Cet état de fait pose d’ailleurs problème à un nombre croissant de frères qui voudraient bien faire évoluer ce système de recrutement. Dans le même ordre d’idée, le cloisonnement entre hommes et femmes reste très fort au sein des obédiences. 99 % d’entre elles n’acceptent pas de femmes en leur sein. Interrogés, les maçons arguent de l’impossibilité « de discuter de tout avec ma femme, membre d’une autre obédience », selon la formule de Philippe-Henri Morbach de la Grande Loge de France. À ceci, les frères et sœurs du Droit Humain, une obédience mixte, rétorquent qu’au contraire, la mixité enrichit la ré-flexion. Affaire de goût, peut-être. Mais une chose est sûre : les représentantes des obédiences féminines reconnaissent volontiers que leurs frères les regardent souvent avec condescendance. Pourtant, ce dont souffrent certainement le plus les maçons aujourd’hui, c’est d’un certain essoufflement de leurs réflexions. Essoufflement d’autant plus douloureux que les francs-maçons ont longtemps été avant-gardistes en matière de progrès social. Les maçons furent à l’origine des lois sur l’impôt sur le revenu, ont contribué au droit à l’avortement, à la suppression de la peine de mort..… Mais, depuis les années cinquante, « l’institution est plutôt suiviste », note Roger Dachez, historien et président de l’Institut maçonnique de France. « Elle est parfois décalée par rapport à la société civile. Elle pose les questions avec retard ou revient sur de vieilles lunes qui ne concernent plus les enjeux majeurs »... Après avoir été considérées comme des « laboratoires législatifs », les loges semblent avoir perdu leur capacité d’innovation. Un exemple ? Sur les questions soulevées aujourd’hui par la notion de laïcité, les maçons restent arc-boutés sur la défense de la loi de 1905. « Tout est dans ce texte. L’école doit être un lieu de neutralité : pas de voile car pas de signe distinctif », soutient Philippe-Henri Morbach. Point barre !

Au final, seul le Grand Orient de France semble continuer à vouloir jouer un rôle politique fort, sous la houlette de son grand maître, Alain Bauer. La majorité des autres obédiences franc-maçonnes se concentre sur la quête spirituelle, initiatique, très spiritualiste, de chacun. La franc-maçonnerie s’assimilerait-elle à un cercle de réflexion comme un autre ?

Programme

Pour son 275e anniversaire, la franc-maçonnerie propose différents événements : expositions à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), Alençon, Le Havre, Toulouse et Lyon ; concerts à la Sainte-Chapelle (Palais de justice de Paris), édition d’un timbre postal, colloque « Hommes-femmes : de la différence à l’égalité » à Lyon, le 28 juin… Sans oublier des ouvrages, des émissions spéciales sur France culture.
Voir le site du 275e anniversaire de la maçonnerie française
Contact : Alain-Jacques Lacot, tél. 01 45 23 43 91, courriel : ajl@godf.asso.fr