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| L’interview de De Wever au Spiegel | |
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Stans Fondateur
Nombre de messages : 16069 Age : 72 Localisation : Bruxelles - Département de la Dyle Langue : français Emploi/loisirs : histoire, politique Date d'inscription : 10/03/2006
| Sujet: L’interview de De Wever au Spiegel Mar 14 Déc 2010, 2:04 pm | |
| L’intégralité de l’interview de De Wever au Spiegel
SPIEGEL : Mr De Wever, combien de temps donnez-vous encore à la Belgique ?
De Wever : Je ne suis pas un révolutionnaire. Je ne travaille pas à la fin immédiate de la Belgique. Je n’ai d’ailleurs pas à le faire, car la Belgique va quelque part disparaître d’elle-même. Ce que les Flamands veulent maintenant, c’est avoir la compétence de la justice, des impôts et de la politique sociale. Pour nous, la politique étrangère devrait revenir à l’Union européenne. Sur la durée, l’Etat belge n’a pas d’avenir : il est trop petit pour avoir de grandes ambitions politiques, et trop hétérogène pour gérer des compétences comme les impôts ou la politique sociale.
SPIEGEL : Avec de tels arguments, la Bavière aurait déjà fait sécession de l’Allemagne depuis longtemps.
De Wever : Non, la Bavière fait partie de la démocratie allemande. L’histoire allemande est celle d’un pays qui s’est uni. L’histoire belge est celle d’un pays qui se disloque. Avec des conséquences fatales : En 2003, l’économiste allemand Hans-Werner Sinn disait : « L’Allemagne est le malade de l’Europe ». Les entreprises quittaient le pays ou tombaient en faillite. Pour le citoyen, la pression fiscale augmentait sans cesse. Aujourd’hui, l’Allemagne est redevenue la locomotive de l’Europe et la Belgique, après des querelles politiques interminables, est devenue le malade de l’Europe.
SPIEGEL : Vous avancez des arguments économiques pour permettre à la Flandre de faire sécession ?
De Wever : Encore une fois : s’il était possible de réaliser les réformes qui s’imposent dans un état Belgique, je ne m’y opposerais pas. Mais ce n’est pas possible. Les Wallons, et les socialistes en particulier, en tant que premier parti, bloquent toutes les réformes sensées. C’est pour cela que je dis : la Belgique ne fonctionne plus ! La Belgique est une nation qui a échoué.
SPIEGEL : Vous voulez un morcellement en petits états, alors que partout autour de vous, on travaille à une Europe unie ?
Les développements en Europe et surtout l’introduction de l’euro rendent une scission beaucoup plus facile. Avant, je pensais que si on abandonnait le franc belge, cela conduirait à une catastrophe économique. Aujourd’hui, les deux parties de la Belgique payent en euros, tout simplement.
SPIEGEL : On entend souvent dire que les derniers éléments qui maintiennent la Belgique, c’est la bière, le football et la maison royale. Mais les Flamands et Wallons ont leur propre bière, le football belge est de seconde zone et ne contribue pas à l’identification nationale. Reste le Roi.
De Wever : Beaucoup de gens ont une représentation romantique de la monarchie. Même dans la France républicaine, le président a des allures de monarque. Mais la monarchie appartient à l’Ancien Régime, elle est dépassée. Pour nous, le Roi n’est pas important.
SPIEGEL : Mais c’est quand même lui que les politiciens chargent de former un gouvernement.
De Wever : Le problème, c’est que le Roi joue encore un rôle politique. Quand il y a une crise, le rôle du Roi est important, c’est lui qui exerce la tutelle sur la formation du gouvernement. Pour nous, Flamands, cela pose un problème, parce que le Roi ne pense pas comme nous. Pour Wallons, c’est un avantage, car ils sont alliés avec lui. Nous sommes pour la république.
SPIEGEL : Six mois après les élections législatives, il n’y a toujours pas de gouvernement. Le Roi a échoué ?
De Wever : C’est une question très dangereuse, parce que Spiegel est aussi lu en Belgique.
SPIEGEL : Répondez honnêtement.
Il est chaque jour plus difficile de former un gouvernement fédéral. Si nous rentrons dans un tel gouvernement, nous courons le risque de perdre les prochaines élections. Nous avons été élus parce que nous prônons des réformes radicales et parce que les électeurs nous font confiance pour ne pas capituler après 6 mois de négociations.
SPIEGEL : Reste la possibilité de nouvelles élections. Le ministre-président de la région bruxelloise, un socialiste francophone, dit que ce serait la fin de la Belgique.
De Wever : Il est assez remarquable de constater que ceux qui ne veulent pas la fin de la Belgique soient les premiers à en parler.
SPIEGEL : Vos adversaires sont enclins à penser que vous bloquez les négociations pour provoquer de nouvelles élections et amasser encore plus de voix.
De Wever : Nous avons une stratégie, dont nous ne faisons aucun mystère : nous voulons aller pas à pas vers la Flandre et l’Europe. Nous ne voulons pas de révolution, je suis un conservateur convaincu, je ne suis pas un aventurier
SPIEGEL : Pourquoi les Wallons accepteraient-ils l’autonomie financière de la Flandre ? La Flandre, économiquement prospère, leur couperait les vivres et les tiendrait en laisse.
De Wever : Nous sommes en faveur d’une solidarité, y compris financière. Mais si nous versons de l’argent à la Wallonie, il faut que ça se fasse à des conditions normales. Cet argent ne doit pas être une injection, comme la drogue pour un junkie.
SPIEGEL : Mais dans l’histoire de Belgique, n’y a-t-il pas eu une époque où les rôles étaient inversés ? Beaucoup de Flamands trouvaient du travail au sud du pays.
De Wever : Il est exact que la Wallonie était performante sur le plan économique, au 19ème siècle et au début du 20ème. Mais il n’y avait pas de transfert financier vers la Flandre. Seuls les entrepreneurs, qui vivaient à Bruxelles, étaient riches. Dire que nous, Flamands, avons bénéficié de la solidarité et que nous ne voulons plus payer maintenant que nous sommes riches, c’est une falsification de l’histoire.
SPIEGEL : Pour vous, ce n’est donc pas seulement une question d’argent ?
De Wever : Evidemment, il en va aussi de notre identité nationale et culturelle. Il est vrai que dire cela aujourd’hui, c’est paraître un peu ringard. L’expression moderne, c’est le « citoyen global », le plus mobile possible, et flexible et riche. En réalité, la grande majorité des gens a peur de la globalisation et se pose la question : quelle est mon appartenance ? Chez nous, c’est pareil.
SPIEGEL : Et à ceux-là, vous offrez une « identité flamande » ?
De Wever : Oui. Quand des gens ne trouvent plus leur identité culturelle et sociétale, ils se détournent des partis démocratiques et se tournent vers ceux qui propagent des idées nationalistes malsaines et partiellement racistes. Ceux-là disent : Nous sommes menacés ! Virez les étrangers ! Chassons ces religions étrangères.
SPIEGEL : C’est n’est pas votre slogan ?
De Wever : Nous voulons l’intégration des étrangers, pas leur expulsion. Mais c’est précisément cette intégration qui fait défaut. Chez nous, en Belgique, les immigrés de la quatrième génération vivent encore entre eux. Le grand-père était étranger, ses fils, les fils de ses fils, etc. Chez nous, même le président Obama serait encore un étranger. Si nous ne trouvons pas une solution à ce problème, un nombre croissant de personnes vont se tourner vers des populistes tels que Geert Wilders ou Jean-Marie Le Pen.
SPIEGEL : Mais pour beaucoup de Belges aussi, Bart De Wever est le loup déguisé en agneau. Il avance docilement, mais il mordra dès qu’il le pourra.
De Wever : Si ces gens avaient raison, et si j’étais effectivement un politicien d’extrême droite qui ne dit pas son nom, pourquoi alors n’ai-je pas rejoint immédiatement le Vlaams Blok en 2003 ?
SPIEGEL : Vous parlez de ce parti d’extrême-droite séparatiste flamand.
De Wever : Ils ont obtenu le quart des voix en 2004, 24 %, c’était la plus grande force politique de Flandre, j’aurais immédiatement été élu au Parlement. Au lieu de cela, j’ai rejoint à cette époque un tout petit parti.
SPIEGEL : Pourquoi ?
Je ne veux pas être lié aux mouvements de la droite populiste. Ils nuisent au mouvement flamand.
Interview : Hans-Jürgen Schlamp, Christoph Schult
Traduction : Bernard Demonty | |
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