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 Le contrat social belge, prochaine victime de l'état formel

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François Barberis
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Le contrat social belge, prochaine victime de l'état formel Empty
MessageSujet: Le contrat social belge, prochaine victime de l'état formel   Le contrat social belge, prochaine victime de l'état formel EmptySam 21 Mai 2011, 8:43 am

Nous assistons actuellement à un phénomène assez rare, pour ne pas dire unique, en géopolitique : le passage graduel et dans une certaine indifférence, y compris par les populations les plus directement concernées, d'un état réel à un état formel.

Qu'est-ce qu'un état réel ? C'est une construction politique qui a pour mission d'assurer les missions régaliennes intérieures et extérieures, et surtout, depuis la moitié du 20ème siècle, la mission sociale de contrôle et de répartition des richesses produites, ce qu'il est convenu d'appeler le contrat social.

Il n'est pas inutile de rappeler qu'elles sont ces fonctions régaliennes et de dire un mot sur le contrat social et la manière dont il est devenu une fonction de plus en plus importante de l'état réel, jusqu'à être prédominante.

Les fonctions régaliennes traditionnelles sont bien connues. Elles nous proviennent de la plus haute antiquité : la défense des frontières, la représentation extérieure, la violence légitime sur l'espace intérieur, la production et l'application des règles de droit, et pour financer l'ensemble de ces fonctions, l'émission de la monnaie et la levée de l'impôt, que ce soit l'impôt en argent (la fiscalité) ou l'impôt en sang, largement utilisés par les monarques dans les temps pas très anciens, l'équipement du territoire, d'abord pour en assurer la défense, puis pour assurer.la circulation et la sécurité des agents collecteurs de ce double impôt, et puis, mais beaucoup récemment, pour assurer un certain confort matériel à la population (réseau d'eau, d'électricité, etc...)

Le poids économique de ce premier paquet de fonctions régaliennes n'était pas très élevé, mais rapporté à des systèmes de production de richesse souvent archaïque et peu performantes, il absorbait jusqu'à 30% environ de la production nationale dans un pays comme la France au 17ème siècle, et parfois bien plus.

La révolution thermodynamique britannique du 18ème siècle (qui fut, avec la Révolution française de 1789 et quelques années auparavant la Révolution américaine de 1776 qui vit la fondation de l'état américain, l'un des trois événements majeurs de l'histoire de l'humanité et dont nous n'avons pas encore totalement assumé les conséquences); cette révolution thermodynamique qui fit passer l'humanité de l'énergie prélevée sur les cours d'eau (tissages) ou sur les animaux de traits (agriculture) à une énergie plus concentrée et plus mobile (la machine à vapeur d'abord puis le moteur à combustion interne ensuite) a permis à la production nominale de richesses de faire un bond dès la 1ère partie du 18ème siècle, donnant naissance à l'ère industrielle et à ses développements bien connus.

Dès cet instant, et avec un décalage d'environ 1 siècle, la revendication portant sur la répartition moins inégalitaires de ces richesses complémentaires, initialement captées par la classe sociale qui formait la bourgeoisie éclairée (les ''200 Familles'' en France, par exemple) fit l'objet de débats puis de luttes sociales; et ce sont ces luttes qui conduisirent à l'émergence du contrat social. En France, ce furent d 'abord les luttes sociales du début du 20ème siècle avec Jaurès, précédées des physiocrates de la fin du 19ème, puis surtout le Cartel des gauches entre les deux guerres, couronnées par le programme social du Conseil national de la Résistance dont on sait qu'il fut élaboré à Londres en 1940 (?) par De Gaulle et Jean Moulin.

Toute cette introduction pour établir que la démarche qui a mené au contrat social moderne est récente et qu'il ne faut pas confondre avec le contrat social de Jean Jacques Rousseau qui se préoccupait peu d'économie, mais beaucoup plus de valeurs morales, d'éducation, de citoyenneté..
Aujourd'hui, ce contrat social est tellement devenu partie de la vie sociale et sociétale, que sa présence apparaît comme éminemment naturelle, ancré dans la tradition démocratique, intangible, indéfectible (ce qu'on appelle le ''socio-économique'' ) : occupons-nous du socio-économique, lit-on dans de nombreux messages et dans de nombreux articles de presse, le reste serait de peu d'importance!. Or rien n'est plus faux. On ne peut maintenir un contrat social si la nation, qui est son gisement, n'existe plus et si l'état qui est le moyen technqiue de son existence,d e réel, est devenu formel.

Il ne faut pas oublier en effet que le contrat social est une production double : celui de la nation (voir mon poste sur le thème : qu'est-ce que la Nation ?) et celui de l'état, les deux constructions intervenant à parts égales dans le maintien et la perpétuation du contrat social :
- la nation, en tant que gisement, base fondatrice de la conscience morale collective qui va permettre à toute une population d'accepter l'impôt qui va pêrmettre de financer le contrat social (à l'inverse, il n'y ara jamais un contrat social franco-allemand, par exemple, car il n'y a pas de nation franco-allemande; de même qu'il n'y aura jamais de contrat social européen, pour la même raison);
- l'état, car il est l'instrument technique indispensable pour assurer la collecte des ressources fiscales et para-fiscales qui vont contribuer à financer le contrat social et pour l'arbitrage des conflits entre les ayants droits.

Toute cette longue introduction pour arriver à la conclusion suivante : sans nation et sans état réel, c'est-à-dire sans puissance publique forte, il ne saurait y avoir de maintien du contrat social.

Que se passe-t-il lorsqu'un état réel devient un état formel, c'est-à-dire lorsque la conscience morale collective s'est dissoute en querelles culturelles d'abord puis ethniques ensuite, et lorsque l'état ne dispose plus que de faibles leviers pour assurer la collecte de l'impôt nécessaire au financement di contrat social ? La réponse est aisée : le contrat social disparaît.

Ainsi, le contrat social disparaîtra en Belgique avec l'affaiblissement et la disparition de l'état réel, remplacé par un état formel, c'est-à-dire une simple interface extérieure à laquelle on aura ôté, une à une, ses fonctions régaliennes, puis ses fonctions sociales en lui ayant au préalable ôté son rôle fiscal. Et c'est bien ainsi qu'il faut apprécier la revendication flandrienne de régionaliser les ''compétences'' sociales. Ce n'est pas une revendication de régionalisation qui est ainsi présentée. C'est une revendication de démantèlement; car bien entendu cette ''régionalisation'' (en fait cette re-nationalisation mais sur une base de population plus étroite limitée à ceux qui vivent au nord de la frontière linguistique) sera la marque de la fin définitive d'une expérience d'à peine 70 ans; la fin du contrat social.

Il s'agit d'un événement majeur qui attend les trois parties de la société belge; et ce démantèlement , cette fin du contrat social, est déjà acté, nonobstant l'issue des négociations en cours. On imagine mal en effet, après toutes les accusations de faiblesse morale portées par l'opinion publique du nord du pays contre celle du sud, que le contrat social puisse être refinancé comme d'antan, même -et surtout si- c'est un Premier Ministre PS, en l'occurrence M. Elio di Rupo, qui prend en charge les lambeaux de l'état.

Cette question de la fin du contrat social -et donc, ayons le courage de le dire- de l'instauration d'une situation de précarité dans le sud du pays, et accessoirement à Bruxelles dans un premier temps, mais assez rapidement aussi dans le nord du pays, ne serait pas très importante si ces populations ne se situaient au centre de l'Europe. Après tout, qui se soucie du contrat social en Arménie ou en Azerbaïdjan ? Mais tel n'est pas le cas. Et la situation de déséquilibre interne qui va naître de cette disparition du contrat social aura des conséquences pour les autres partenaires. ce n'est pas bien entendu via des troubles de la rue que cette transmission des déséquilibres internes aux autres partenaires se fera, mais par des moyens plus modernes et plus instantanés : l'épargne des gens et le refinancement de la dette publique. Lorsque le contrat social disparait, les comportements d'épargne s'accélèrent, le consentement à l'impôt diminue, la fuite de l'épargne stockée prend un tout autre rythme. Et la crise politique interne d'un petit pays risque de se traduire rapidement par une crise financière au cœur même de l'Europe, à un moment où le Fonds Monétaire International, le FMI, s'il devait être piloté par un directeur venant des BRICS, sera beaucoup moins enclin à faire du social pour les ''riches états de l'OCDE''.

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