Choisir entre leur peuple et leurs poches

Il s’appelait Fernand Massart. Au début de la Seconde Guerre mondiale, Massart entre dans la Wallonie libre clandestine et accomplit des actes de sabotages sur la ligne ferroviaire Namur-Liège. Dénoncé par un rexiste, il fuit en France, se rend en Espagne, où il est arrêté, mais parvient à gagner Londres. Il fera partie d’un commando britannique et participera à de nombreuses campagnes.

Au cours de la grande grève de 1960-1961, il milite au Mouvement Populaire Wallon d’André Renard. L’Encyclopédie du Mouvement wallon (Tome II, p. 1081-1083) nous apprend qu’il démissionna du Parti socialiste belge en 1963, "parce que le parti refuse de prendre en considération le résultat du pétitionnement organisé par le Collège exécutif de Wallonie : 645.499 signatures sont rassemblées en faveur du referendum et contre l’adaptation du nombre de parlementaires". Mais, dans l’article de l’EMW, Paul Delforge précise :

"En fait, il démissionne du PSB parce qu’il n’est pas d’accord avec la ligne du parti qu’il considère plus proche du programme élaboré par le PSC à son congrès d’Ostende que de celui des socialistes wallons. En outre, il ne souhaite pas commenter une phrase qu’il a prononcée au Congrès de Wallonie libre à Namur, demain les mandataires wallons devront choisir entre leur peuple et leurs poches… Le cumul des mandats est implicitement dénoncé."

Wallon avant d’être socialiste : tel était Fernand Massart, dont l’idéal demeura la réunion de la Wallonie à la France.

Aujourd’hui, au PS maître de l’Etat wallon, qui se dit encore "wallon avant d’être socialiste" ? Et qui aurait le courage d’affirmer que "les mandataires wallons devront choisir entre leur peuple et leurs poches" ? Quarante ans plus tard, ayant obtenu le fédéralisme, nous en sommes toujours là, à réclamer que les Wallons se comportent en Wallons avant toute autre considération, et que leurs élus fassent le bon choix, celui de leur peuple ! Et que voyons-nous ? Des mandataires qui se sucrent sur le dos du peuple… en toute bonne conscience.

"(…) ils ont réellement bonne conscience. Ils sont tellement contaminés sinon pervertis par le système dans lequel ils évoluent – et qu’il faut bien qualifier de socialiste – qu’ils ne se rendent plus compte des dérives auxquelles ils se laissent aller. Puisque la chose publique qu’ils devraient servir est aux mains de leur parti et que le parti c’est eux, c’est en toute bonne foi qu’ils la traitent comme si elle leur appartenait en propre. (…) Ils en sont arrivés au point de ne même plus se rendre compte qu’il n’est pas normal de manipuler à leur guise les biens de la communauté, de détourner les crédits pour des projets qui servent leur popularité sinon leur portefeuille, de cumuler mandats et titres, de pratiquer un népotisme flagrant, de corrompre, de s’accorder des avantages abusifs, de s’entourer d’une cour de clients fidèles, de couvrir leurs amis suspects, bref de se conduire en satrapes omnipotents. Ils se permettent ainsi sans aucun scrupule tout ce que la morale réprouve. Ce ne sont plus des parvenus mais des prédateurs inconscients." (Paul Masson, "La bonne conscience", in La Dernière Heure du 21 mai 2006.)

L’Etat wallon est jeune : ses représentants auraient pu nettoyer toute cette boue, changer de cap. Ils en ont eu l’occasion. Tout au moins eussent-ils pu dépolitiser la fonction publique, par exemple. En finir avec les réseaux de sociétés intercommunales, qu’ils nous promettent maintenant (un peu tard) de dégraisser.

Les Wallons se sont fichus dans un sale pétrin. Sur le plan économique, ils ne sont à peu près nulle part. Les effets d’annonce du plan Marshall et autres fariboles ne sont pas la panacée. Il n’y a pas de solution miracle : les choses sont allées trop loin, trop de Wallons ont laissé faire avec une complaisance coupable. Il ne reste qu’à limiter les dégâts pour que la Wallonie soit présentable pour la réunification.

Citation :

En finir avec les réseaux de sociétés intercommunales, qu’ils nous promettent maintenant (un peu tard) de dégraisser.

Voyons GAUVAIN, penses-tu un seul instant que les barons rouges du P.S. iront tuer la vache à lait ?

Stans a écrit:

Voyons GAUVAIN, penses-tu un seul instant que les barons rouges du P.S. iront tuer la vache à lait ?

Nous ne pouvons pas leur faire la moindre confiance. Tant pis si l'on me traite de poujadiste. Comment donner crédit à un parti qui se croit tout permis ?

Dans le cadre belge, il n'y aura pas de rénovation du PS. Le seul véritable espoir de rénovation en profondeur réside dans la réunion à la France, qui provoquerait un électrochoc salutaire.